De la précieuse bibliothèque Jorge Ortiz Linares
De la précieuse bibliothèque Jorge Ortiz Linares
Novelas exemplares. Madrid, 1613. In-8. Le plus rare des Cervantes relié aux armes de Jérôme Bignon.
Auction Closed
December 14, 05:51 PM GMT
Estimate
200,000 - 300,000 EUR
Lot Details
Description
CERVANTES SAAVEDRA, Miguel de
Novelas exemplares
Madrid, Por Juan de La Cuesta, Vendese en casa de Frãcisco de Robles, librero del Rey, 1613
LE PLUS RARE DES CERVANTES : L’ÉDITION ORIGINALE DES NOVELAS DE 1613.
EXEMPLAIRE AUX ARMES DE JÉRÔME BIGNON, GARDE DE LA BIBLIOTHÈQUE DE LOUIS XIV.
“THE EXCESSIVELY RARE FIRST EDITION... THE HIGH-WATER-MARK OF THE SHORT STORY IN THE 17th CENTURY” (MAGGS, 1936, Cat. 621)
In-8 (193 x 122mm). Bandeaux et initiales gravés sur bois. Marque typographique de Juan de La Cuesta sur la page de titre : un faucon encapuchonné avec la devise Post tenebras spero lucem
COLLATION : ¶4 ¶¶8 A-Z 2A-L82M2 : 286 feuillets
CONTENU : ¶1r : titre, ¶2r : Tabla de las novelas, ¶2v : Fee de erratas, Tassa, Approvacion, ¶4v décidace au roi : El Rey, ¶¶2r : Privilegio de Aragon, ¶¶3v : Prologo al Lector, ¶¶6v : A Don Pedro Fernandez de Castro, ¶¶6r : Soneto, A1r : Novela de la Gitanilla, E6r : del amante liberal, I2r : de Rinconete y Cortadillo, L7r : de la Española Inglessa, O7r : El Licenciado Vidriera, Q6r : La fuerça de la sangre, S1v : El zeloso Estremeño, V6v : La illustra fregona, 2A5v : Las dos donzelllas, 2D4r : La señora Cornelia, 2G1r : El casamiento engañoso, 2G8v : La de los perros Cipiõ, y Bergãça
RELIURE FRANÇAISE VERS 1660. Basane maroquinée de couleur ivoire, décor doré, armes au centre des plats, triple filet en encadrement avec rosette aux angles, dos à nerfs très orné et doré, gardes de papier peigne dans les tons noirs, avec un numéro “35” à l’encre au contreplat, tranches dorées. Boîte de maroquin rouge par Zaehnsdorf
PROVENANCE : Jérôme II Bignon (1627-1697 ; Olivier-Hermal-de Roton, pl. 868, fer 1), Conseiller d’État, Garde de la Bibliothèque du Roi et Maître de la Librairie en 1651, en survivance de son père mais marginalisé par Louvois et démis en 1684 — Maggs, catalogue 621, The Novel from Antiquity to Present day, item 542, cet exemplaire marqué £750, vendu à Jorge Ortiz Linares le 21 décembre 1936
Quelques petites taches dans quelques marges, très modestes et pâles dans les bas de pages des derniers cahiers. Reliure frottée, légère décoloration au plat inférieur
La composition des Novelas exemplares accompagne celle des deux parties du Don Quichotte. On en sait très peu quant à l’activité littéraire de Cervantès à Madrid entre 1608 et 1612. Il participe à la vie d’académies de poésie (Académie du Parnasse). Inquiet pour son salut et frappé par des deuils familiaux, il entre dans des confréries religieuses (1609). Cervantès tente, mais en vain, de renouer avec l’aventure en accompagnant le comte de Lemos à Naples (1610). Ces années marquent en réalité l’aboutissement de la composition des Novelas commencées aux “dernières années du règne de Philippe II” (J. Canavaggio), mort en 1598. Les temps de composition des deux Quichotte et des Novelas ont donc dû se croiser. Le 9 juillet 1612, l’approbation officielle est donnée aux Novelas exemplares. Craignant d’autres pirateries éditoriales après celles qui ont touché Don Quichotte, Cervantès obtient au bout d’un an, le 31 juillet 1613, un privilège général pour la Castille et l’Aragon. Le 9 septembre 1613, Robles acquiert le manuscrit des Novelas pour 1600 réaux. Le 14 juillet 1613, Cervantès dédie son œuvre au comte de Lemos. L’impression est achevée au début du mois d’août 1613.
Les Novelas connurent un succès immédiat et fulgurant avec quatre éditions en moins de dix mois dont une édition pirate à Pampelune et une contrefaçon à Lisbonne. Au cours du XVIIe siècle, vingt-trois éditions furent publiées en espagnol. L’Angleterre offrit le meilleur accueil aux Nouvelles cervantines portant sur la scène nombre d’entre elles. De son côté, la France
“va leur vouer un véritable culte : traduites en 1615 par Rosset et d’Audiguier, rééditées à huit reprises au cours du XVIIe siècle, les Novelas seront le livre de chevet de tous ceux qui se piquent de pratiquer l’espagnol (...) elles vont offrir tout un répertoire de situations dont la comédie romanesque fera ses délices ; aux prosateurs du Grand Siècle (...) elles proposeront des modèles qu’ils ne manqueront pas d’imiter. Cette prédilection des gens de goût vaudra aux Nouvelles cervantines d’être ouvertement préférées au Don Quichotte ; ce n’est qu’au XVIIIe siècle que celui-ci prendra sa revanche retrouvant une suprématie qui ne lui a plus été contestée depuis lors” (J. Canavaggio, op. cit., p. 288).
La rareté des Novelas est proverbiale. Jacques-Charles Brunet écrivait déjà : “première édition de ces nouvelles, si rares, qu’en 1828 Salva n’en connaissait pas un seul exemplaire en Espagne”. Le bibliographe français citait néanmoins deux exemplaires, celui de De Thou et celui de Heber. Aucun exemplaire n’est passé sur le marché des ventes aux enchères depuis 1977. Aucun exemplaire ne figure dans le fichier Berès.
La famille Bignon est incontestablement l’une des plus remarquables parmi celles des grands parlementaires français de l’Ancien Régime, non seulement par son lien avec la Bibliothèque du Roi, future Bibliothèque nationale, qu’elle servit pendant deux siècles, mais aussi par l’immense culture de ses pères fondateurs : Jérome I Bignon (1589-1656) et son fils Jérôme II Bignon (1627-1697). Originaire de Saint-Denis d’Anjou, Jérôme I Bignon fut éduqué par son père Roland Bignon, simple avocat. Doté d’une belle culture humaniste (langues, philosophie, mathématiques, droit, histoire et théologie), Jérôme Bignon devint particulièrement compétent en droit civil et ecclésiastique. En 1615, il fait son Grand Tour en Italie et rencontre Girolamo Aléandro, Paolo Sarpi et le cardinal Frédéric Borromée, fondateur de la bibliothèque Ambrosienne. Proche des plus hautes sphères administratives, il devint avocat général au Parlement de Paris en 1626. Sa carrière est tôt marquée par une proximité avec ce qui deviendra Port-Royal. Il rencontre le fameux abbé de Saint-Cyran en 1628. En 1637, ce dernier crée les Petites Écoles à Port-Royal des Champs. Le jeune Jérôme II Bignon, âgé de dix ans, y est placé dès l’été 1637. Il en devient l’un des premiers élèves. Bignon y suivra cet enseignement remarquable jusqu’en 1645, précédant Jean Racine qui y fut élève de 1646 à 1655. En 1642, Richelieu avait nommé Bignon père grand maître de la Bibliothèque du Roi après la mort de De Thou. Anne d’Autriche le fit entrer au Conseil du Roi. Madame de Sévigné écrira à Madame de Grignan le 12 janvier 1674 : “Tel était Bignon, le plus bel esprit de son siècle”. Jérôme II Bignon avait donc eu les meilleurs maîtres possibles au XVIIe siècle. En 1651, il obtint la survivance de la charge de Grand Maître de la Bibliothèque du Roi, devint avocat général du Parlement de Paris en 1673, charge à laquelle il renonça pour devenir Conseiller d’État en 1678. En 1684, défavorisé par sa mésentente avec le ministre Louvois, il fut écarté de sa position à la Bibliothèque au profit de Camille Le Tellier de Louvois, alors âgé de huit ans.
Les livres de la bibliothèque Bignon furent vendus par l’abbé Jean-Paul Bignon (1662-1743) au célèbre financier John Law, qui les revendit au cardinal Dubois. Ils passèrent en vente en Hollande, catalogués par format et par titre : Bibliotheca Duboisiana ou Catalogue des livres de la bibliothèque de son éminence Monseigneur le Cardinal Dubois recueillie ci devant par Monsieur l’abbé Bignon... (La Haye, 1725). Nous n’y avons pas trouvé trace de cet exemplaire des Novelas, quoique la collection Bignon soit extrêmement riche en livres espagnols et aussi en Cervantès, possédant un Persiles (Madrid, 1617, n° 7192), un Don Quixote de Madrid en 1605 (n° 7339) et la seconde partie apocryphe du Quixote par Fernandez de Avellaneda (Tarragone, 1614, n° 16646). Gageons que les Novelas furent vendues dans un lot
BIBLIOGRAPHIE
J.-C. Brunet, Manuel, I, col. 1752-1753 — L. Rius, Bibliografia critica de las obras de Miguel de Cervantes, Madrid, 1895, III, n° 219, pp. 111-113 — sur Jérôme Bignon et sa famille : J. Lesaulnier et A. McKenna, Dictionnaire de Port-Royal, Paris, 2004, p. 178
The rarest work of Cervantes, in a binding with the arms of Jérôme Bignon, custodian of the Library of Louis XIV.
"The excessively rare first edition... The high-water-mark of the short story in the 17th century" (Maggs, 1936, cat. 621).
Lo más raro de Cervantes : la edición original de Novelas de 1613.
Ejemplar con armas de Jérôme Bignon, bibliotecario de Luis XIV.
“The excessively rare first edition... the high-water-mark of the short story in the 17th century” (MAGGS, 1936, Cat. 621).
J.-C. Brunet, Manuel, I, col. 1752-1753 — L. Rius, Bibliografia critica de las obras de Miguel de Cervantes, Madrid, 1895, III, n° 219, pp. 111-113 — sur Jérôme Bignon et sa famille : J. Lesaulnier et A. McKenna, Dictionnaire de Port-Royal, Paris, 2004, p. 178