De la précieuse bibliothèque Jorge Ortiz Linares

De la précieuse bibliothèque Jorge Ortiz Linares

View full screen - View 1 of Lot 37. Madrid, 1816. 33 eaux-fortes. Envoi de Valentin Carderera à Théophile Gautier.

Goya y Lucientes, Francisco José de

Madrid, 1816. 33 eaux-fortes. Envoi de Valentin Carderera à Théophile Gautier

Auction Closed

December 14, 05:51 PM GMT

Estimate

80,000 - 120,000 EUR

Lot Details

Description

Goya y Lucientes, Francisco José de

La Tauromaquia

Madrid, 1816


TRÈS IMPORTANT EXEMPLAIRE DE LA TAUROMAQUIA DE GOYA : APPORT ESSENTIEL À L’ŒUVRE DE L’ARTISTE.


EXEMPLAIRE DE PRÉSENT DONNÉ PAR LE PEINTRE VALENTÍN CARDERERA À THÉOPHILE GAUTIER, L’UN DES PREMIERS ADMIRATEURS DE GOYA EN FRANCE.


ÉDITION ORIGINALE


In-folio oblong (420 x 294 mm). Titre et explication des planches imprimés sur un papier vergé fin au filigrane Bartolome Mongelos donnant des explications sur les sujets traités et les personnages représentés


ILLUSTRATION : 33 eaux-fortes, aquatintes et pointes sèches originales de Francisco Goya imprimées sur un papier vergé et épais. Les planches 5, 8, 9, 12, 14, 15, 19 ont le filigrane Morato, les planches 24 et 26 ont le filigrane N°1, le reste est sur papier identique mais sans filigrane


EX-DONO autographe signé de Valentín Carderera :


La Tauromaquia de F. Goya

A M. Theophil Gauthier (sic)

en prueba del mas distinguido aprecio

Su admirador

Valentín Carderera


RELIURE DE L'ÉPOQUE. Dos de maroquin rouge avec l’inscription en lettres dorées “Goya — Los Toros”, plats de percaline rouge, tête dorée


PROVENANCE : Valentín Carderera (petite signature autographe sur le second feuillet de garde de la reliure, avec, d’une autre écriture, l’adresse de Carderera à Madrid : Plaza de las Cortes 7) — Théophile Gautier (ex-libris gravé daté de 1872 ; sa vente : Catalogue des livres composant la bibliothèque de M. Théophile Gautier, Paris, Labitte, 1873, n° 66 : “exemplaire avec envoi signé Valentin Calderera (sic)”. Seule suite de Goya possédée par Gautier) — petit timbre sec “A. O” sur les deux premiers feuillets de garde — acquis en vente aux enchères par Jorge Ortiz Linares : Paris, Drouot, 7 juin 1962, 35.430 FF


Exemplaire légèrement court de marges, minuscule trou dû à un manque de papier dans la pl. 22 (2 mm), quelques très pâles petites taches dans les marges de quelques planches (22, 23, 25), très pâle auréole due à une mouillure ne touchant pas l’image dans le coin inférieur droit à partir de la pl. 21, petite déchirure restaurée dans la marge de la pl. 19


Dans cette superbe série consacrée à la tauromachie, Goya exprime sa grande connaissance de cet art typiquement espagnol qu'il a pratiqué avec passion dans sa jeunesse. Comme personne avant lui, il peint avec vivacité et puissance le combat entre l'homme et le taureau, présentant l'origine et l'histoire de la tauromachie en Espagne suivies des prouesses de certains de ses contemporains comme Martincho, Pedro Romero et d'autres.


Valentín Carderera (1796-1880), célèbre peintre espagnol, fut un grand collectionneur de Goya (toiles, dessins et gravures). Il fut peintre de cour de la reine Isabelle II et membre du conseil d’administration du Prado. Sans lui et sans son œuvre de collectionneur, la réception de Goya dans l’Europe du XIXe siècle, et donc la préservation de ses travaux, eut été bien différente. Sur le rôle essentiel de Carderera dans la préservation de l’œuvre de Goya, Tomás Harris est d’une grande clareté :


“That Goya’s drawings and engravings were not lost or entirely scaterred outside Spain is due to three facts : that Goya gave a vast number of his works to his great friend the connoisseur and historian, Juan Agustín Ceán Bermúdez ; that another large part of his production was stored away by his son Javier on his departure for France, and these two groups were later united in the collection of Valentín Carderera y Solano (...) He was an ardent admirer of Goya (...) During his lifetime Carderera amassed a vast collection of paintings, drawings and engravings, and he possessed at one time some four hundred of Goya’s drawings, two hundred and seventy-two of which were acquired by the Prado Museum in 1886, as well as the greatest collection of his engraved work ever to have been formed” (T. Harris, op. cit., I, p. 11)


L’œuvre de Goya trouva d’abord son plus grand écho en France. Déjà, Vivant Denon possédait une première édition des Caprichos rapportée d’Espagne sous l’Empire. L’exemplaire fut acquis par la Bibliothèque nationale devenant la première œuvre gravée de Goya à entrer dans une collection publique. Carderera, auteur de l’un des premiers textes publiés sur Goya en 1835, fut le grand propagateur du peintre espagnol en France. Une récente exposition à la Biblioteca Nacional de España lui a rendu hommage (2019). Ses journaux de voyage récemment publiés témoignent de son incroyable activité d’apôtre. Carderera était un familier de Mérimée. Il connaissait Charles Blanc, éditeur de la Gazette des Beaux-Arts, Philippe Burty, qui traduisit son article et collectionna Goya avec ferveur, ou l’artiste Achille Devéria qui devint Directeur du Département des Estampes à la BnF en 1849, sans parler des premiers spécialistes de Goya : Eugène Piot, Paul Lefort et Charles Yriarte. Carderera rencontra aussi Delacroix et l’un des grands mages romantiques, selon la formule de Paul Bénichou : Théophile Gautier.


Les journaux de voyage de Valentín Carderera donnent avec précision la date de présent de cet exemplaire à Théophile Gautier, lors d’une visite que le peintre espagnol lui rendit, le dimanche 13 novembre 1859. Dans Tra los montes (Paris, 1843, p. 56), Gautier reconnaissait déjà que les “abominables mégères des Caprices” sont des “portraits d’une exactitude effrayante” et parlait de la Tauromachie au sujet de corridas qu’il avait vues. Gautier avait auparavant publié un article dans La Presse sur les Caprices de Goya (5 juillet 1838). En 1842, événement déterminant pour la réception de Goya en France, Gautier donne une célèbre préface au premier catalogue de l’œuvre gravé de Goya que publie Eugène Piot, fortement conseillé par Valentin Carderera (Le Cabinet de l’amateur et de l’antiquaire). Pour Gautier, Goya est le dernier peintre espagnol avant la décadence de la peinture ibérique au XIXe siècle : “Francisco Goya y Lucientes peut être appelé à bon droit le dernier peintre espagnol (...) il est le petit-fils encore reconnaissable de Velazquez. Après lui (...) la décadence est complète, le cycle de l’art est fermé. Qui le rouvrira ?” (p. 337). La réponse est connue : Picasso. Dès cette date, Théophile Gautier connaissait de l’œuvre gravé non seulement les Caprichos mais aussi La Tauromaquia : “Goya était un aficionado consommé, et il passait une grande partie de son temps avec les toreros. Aussi était-il l’homme le plus compétent du monde pour traiter à fond la matière (...) Goya a répandu sur ces scènes ses ombres mystérieuses et ses couleurs fantastiques” (p. 344). On ne peut ainsi que reconnaître l’importance de la redécouverte de cet exemplaire, preuve matérielle de la dissémination heureuse de l’œuvre de Goya.


BIBLIOGRAPHIE

T. Harris, Goya. Engravings and lithographs, 1983, t. II, pp. 307-310 — Delteil 224-256 — P. Fayos-Pérez, “Valentín Carderera and the dissemination of Goya’s graphic work in France”, Burlington Magazine, déc. 2020, pp. 1048-1055 — Théophile Gautier, “Franco Goya y Lucientes”, Le Cabinet de l’amateur et de l’antiquaire, 1842, I, pp. 337-345, préface à la publication par E. Piot du premier “Catalogue raisonné de l’œuvre gravé de Franco Goya y Lucientes” où figure la Tauromachie (pp. 346-366) — J. M. Lanzarote Guiral, Diarios de viaje de Valentín Carderera por Europa (1841-1861). Paris, Londres, Belgica y Alemania, Saragosse, 2016  


First edition. The suite of 33 original etchings, aquatints and drypoints by Francisco Goya in a contemporary binding

Exceptional copy presented by the painter Valentín Carderera to Théophile Gautier, one of Goya’s first admirers in France.


Edición original. Colección de 33 aguafuertes, aguatintas y puntas secas originales de Francisco de Goya.

Encuadernación de época.

Ejemplar excepcional, regalo del pintor Valentín Carderera a Théophile Gautier, uno de los primeros admiradores de Goya en Francia.