Tableaux Dessins Sculptures 1300-1900, Session I
Tableaux Dessins Sculptures 1300-1900, Session I
La Femme et la Folie dominant le monde
Auction Closed
June 15, 02:40 PM GMT
Estimate
12,000 - 18,000 EUR
Lot Details
Description
Félicien Rops
Namur 1833 - 1898 Corbeil-Essonnes
La Femme et la Folie dominant le monde
Signed lower right Félicien Rops
Pencil and stump heightened with red and white on paper
25,4 x 17 cm ; 10 by 6¾ in.
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Félicien Rops
Namur 1833 - 1898 Corbeil-Essonnes
La Femme et la Folie dominant le monde
Signé en bas à droite Félicien Rops
Graphite et estompe et rehauts de rouge et de blanc sur papier
25,4 x 17 cm ; 10 by 6¾ in.
Ed. Deman Collection, Brussels, 1910;
M. Jean-Louis Burtin, Malzéville, 1933.
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Collection Ed. Deman, Bruxelles, 1910 ;
M. Jean-Louis Burtin, Malzéville, 1933.
M. Exsteens, L'Œuvre gravé, Paris 1928, n°512 (repr. of the engraving);
H. Veyrier, Félicien Rops, New York 1975, p. 271 (repr. of the engraving);
E. Rouir, Félicien Rops, Brussels 1992, fig. 36 (repr. of the engraving);
O. Mascha, Félicien Rops und sein Werk (...), Munich 1910, p. 341, under cat. no.862.
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M. Exsteens, L'Œuvre gravé, Paris, 1928, n°512 (repr. de l'eau-forte) ;
H. Veyrier, Félicien Rops, New York, 1975, p. 271 (repr. de l'eau-forte) ;
E. Rouir, Félicien Rops, Bruxelles, 1992, fig. 36 (repr. de l'eau-forte) ;
O. Mascha, Félicien Rops und sein Werk (...), Munich, 1910, p. 341 mentionné sous le n°862.
Paris, 140 Rue du Faubourg Saint Honoré, Exposition rétrospective de l'œuvre peint, dessiné et gravé de Félicien Rops, 20 October-20 November 1933, no.124;
Rome, Museo di Palazzo Venezia, Félicien Rops. La modernità scandalosa, 1833-1898, 22 May-1st September 1996, without numerotation;
Antwerp, Ronny Van de Velde Gallery, Brussels, Maurice Keitelman Gallery, Œuvres de Félicien Rops, 1833-1898 : Peintures, aquarelles, dessins, 20 October-1st December 1996, no.14 (repr.).
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Paris, 140 Rue du Faubourg Saint Honoré, Exposition rétrospective de l'œuvre peint, dessiné et gravé de Félicien Rops, 20 octobre - 20 novembre 1933, n°124 ;
Rome, Museo di Palazzo Venezia, Félicien Rops. La modernità scandalosa, 1833-1898, 22 mai-1er septembre 1996, sans numéro ;
Anvers, Galerie Ronny Van de Velde, Bruxelles, Galerie Maurice Keitelman, Œuvres de Félicien Rops, 1833-1898 : Peintures, aquarelles, dessins, 20 octobre-1er décembre 1996, n°14 (repr.).
Rops delights – and excels – in the depiction of seductive, provocative and powerful women. The sensual force conveyed in this drawing typifies much of his work. He produced a number of erotic drawings, notably to illustrate Gamiani, or Two Nights of Excess by Alfred de Musset. He was close to the literary circles of Paris, and a special edition of the journal La Plume was devoted to him in 1896.
Rops was particularly close to Barbey d'Aurévilly, whose religious conviction he shared. 'No one but he could have illustrated Les Diaboliques, a work that no one but a deeply Christian artist like Barbey d'Aurévilly could have written' wrote Huysmans in Certains. They shared a fascination for fiendish women with a timeless quality, whom they described in all their complexity and power so that the reader would be warned against the dangers of this violent sensuality...
Published in 1874, Les Diaboliques by Jules Barbey d'Aurévilly had a profound impact on Rops: he was enthralled by the women represented by the author, who were seductive and cold, mysterious and manipulative, intelligent and cruel. In each of the six short stories, sometimes hallucinatory visions merged with actual events, leaving many questions unanswered. The artist was horrified, disgusted and curious – and inspired – by these she-devils, Les Diaboliques.
In 1879 he produced a drawing of Prostitution and Madness Ruling the World and returned to this theme when he received the commission to illustrate Les Diaboliques in 1884. In total, Rops made nine engravings, which were published in 1886 and exhibited in 1889.
This was also the year that Joris-Karl Huysmans published Certains, a critical work in which the author discusses his contemporaries, including Gustave Moreau, Puvis de Chavannes, Degas, as well as Wagner and of course Rops. He describes two of the postfaces made for Les Diaboliques; after discussing Prostitution and Madness Ruling the World, he writes about the engraving based on the present drawing: 'In the other, on the same pole, in a clearer sky, a woman also stands; but this is no longer the blonde delinquent we have just seen; this is a tall, strong brunette who lifts her flowing hair, laughs insolently, with her wide mouth, and hikes up the rumpled chemise she wears. This is a fine girl from a better class of house; she is from a less eccentric district, of healthier flesh, her instincts are less rowdy, less treacherous. Behind her, again, Madness peers out with a maternal and crafty smile, stumbling on a billy goat's feet. This brunette does not accost God like the blonde who solicits under the sky; or rather this one smiles, silently, but doesn't yell at her celestial clients, doesn't bawl at the stars'.
The figure of Madness, with a laughing expression and wearing a jester's cap, had already appeared in 1877, in Woman with a Puppet (watercolour, J.P. Babut du Marès collection, Namur) and inspired these words from Octave Uzanne 'Man! ... you will long seem to me to be a feeble puppet with which she [the woman] toys at will'.
Almost half a century later, Jean-Louis Burtin, the collector from Lorraine, was seduced by this fascinating drawing. A political figure, he worked to promote the culture of his region until the 1920s, when he began to devote more of his time to his passion for sculpture and collecting. He acquired more than 300 works by Emile Friant, some of which were sold at Sotheby's, Paris in 2018.
Rops was an exception in this collection, which focused mainly on artists from Lorraine. Nevertheless, Burtin gave him a place of honour: he bought several engravings of the artist's work, a sign of the particular interest he took in him. The present drawing must have been one of the most important works in that impressive collection.
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Rops se complaît – et excelle – dans la représentation de la femme séductrice, provocante et puissante. La force sensuelle qui se dégage de ce dessin caractérise une grande partie de l’œuvre de l’artiste. Il réalise en effet nombre de dessins érotiques, et notamment pour illustrer Gamiani ou Deux nuits d’excès d’Alfred de Musset. Proche du cercle littéraire parisien, un numéro spécial de la revue La Plume lui est consacré en 1896.
Rops est toutefois tout particulièrement proche de Barbey d’Aurévilly, dont il partage la conviction religieuse. « Aussi était-il le seul qui pût illustrer les Diaboliques qu’un artiste, foncièrement chrétien comme Barbey d’Aurévilly, était, seul aussi, apte à écrire » écrit Huysmans dans Certains. Tous deux partagent cette fascination pour la femme démoniaque, hors du temps, et la décrivent dans toute sa complexité et sa force afin d’avertir le lecteur des dangers de cette violente sensualité…
Publiées en 1874, les Diaboliques de Jules Barbey d’Aurévilly marquent profondément Rops : il est fasciné par les femmes décrites par l’auteur, à la fois séductrices et froides, mystérieuses et manipulatrices, intelligentes et cruelles. Dans chacune des six nouvelles, les visions parfois hallucinatoires se mêlent aux événements bien réels, laissant en suspens bien des questions. Entre épouvante, dégoût et curiosité, ces femmes, ces Diaboliques, inspirent l’artiste.
Il exécute dès 1879 le dessin représentant La Prostitution et la Folie dominant le monde, qu’il reprendra lorsqu’il reçoit, en 1884, la commande de l’illustration des Diaboliques. Au total, Rops gravera neuf planches publiées en 1886, et exposées en 1889.
C’est aussi à cette date que Joris-Karl Huysmans publie Certains, ouvrage dans lequel l’auteur se fait le critique de ses contemporains, parmi lesquels Gustave Moreau, Puvis de Chavannes, Degas, mais aussi Wagner et bien sûr Rops. Il décrit deux des postfaces réalisées pour les Diaboliques : après avoir traité de la Prostitution et la folie dominant le monde, il décrit en ces mots la gravure réalisée d’après notre dessin « Dans l’autre, sur le même pôle, en un ciel plus clair, une femme se tient également debout ; mais ce n’est plus la tête de la voyoute blonde de tout à l’heure ; c’est une haute et forte brune qui soulève ses cheveux défaits, rit insolemment, de sa large bouche, relève la chemise de liasse qui la couvre. C’est la belle fille des maisons vantées ; elle est de faubourg moins excentrique, de chairs plus saines, d’instincts moins tapageurs et moins traîtres. Derrière elle, aussi, la Folie tend la tête et sourit, maternelle et retorse, butée sur ses pieds de bouc. Cette brune ne raccroche pas Dieu comme la blonde qui fait la retape en plein ciel, ou celle-là, du moins, sourit, silencieuse, mais n’interpelle pas les célestes Clients, n’engueule pas les astres. »
La figure de la Folie, sous les traits rieurs et affublée d’un chapeau à grelots, apparaît déjà en 1877 dans La Dame au pantin (aquarelle, collection J.P. Babut du Marès à Namur) et inspire ces mots à Octave Uzanne « Homme ! … tu m’apparaîtras longtemps comme un faible pantin dont elle [la femme] joue à plaisir ».
Près d’un demi-siècle plus tard, c’est le collectionneur lorrain Jean-Louis Burtin qui se laisse séduire par notre fascinant dessin. Figure politique, il œuvre pour le rayonnement culturel de sa région avant de se consacrer davantage, à partir des années 1920, à sa passion de sculpteur et de collectionneur. Il acquiert ainsi notamment près de trois cents œuvres d’Emile Friant, dont une partie a été vendue par Sotheby’s à Paris en 2018.
Rops fait figure d’exception dans cette collection qui privilégie les artistes lorrains. Burtin lui fait toutefois une place d’honneur : il acquiert plusieurs gravures de l’artiste, témoignant de l’intérêt tout particulier qu’il lui porte. Notre dessin devait constituer l’une des œuvres majeures de cette impressionnante collection.