Autour de la princesse de Salm | Arts et littérature
Autour de la princesse de Salm | Arts et littérature
Album amicorum dédié à ses amis. 1809-1841. In-8. Illustré de 66 dessins. Rel. de l'ép.
Lot Closed
October 14, 03:43 PM GMT
Estimate
15,000 - 20,000 EUR
Lot Details
Description
[Salm, Constance de Théis, princesse de]
Album amicorum.
1809-1841.
Environ 331 pages numérotées à l’encre rouge et au crayon 1 à 186, et 189 à 331 et 20 feuillets lettrés A à T. Petit in-8 oblong (135 x 215 mm). Chagrin ébène, plats ornés d’un encadrement à froid, inscription en lettres dorées "Album" surmontée du chiffre "C.S" couronné, poussés au centre du plat supérieur, dos lisse orné de filets à froid, doublure et gardes de papier moiré, tranches dorées (Reliure de l’époque).
Papier parfois jauni et quelques rousseurs.Manquent les pages 149 et 150. Charnières restaurées.
RAVISSANT ALBUM AMICORUM DE CONSTANCE DE SALM DÉDIÉ À SES AMIS ET "À TOUS CEUX QUI AIMENT OU CULTIVENT LES LETTRES, LES SCIENCES OU LES ARTS".
"Venés amis, je vous appelle !
Sur mon album inscrivés vous !
d’une gloire toujours nouvelle,
qu’il devienne un titre pour vous !
dans un excès de modestie,
gardés vous bien, je vous en prie,
de m’affliger par un refus ;
Car ce livre qui nous rassemble
Va nous faire rester ensemble,
Même quand nous ne serons plus […]
Ah ! puissent des feuilles légères,
Résister à la faulx du temps,
Et de nos heures passagères, fixer quelques heureux instants […]"
Cet album, commencé le 1er janvier 1809, année où le prince et la princesse de Salm s’installent dans l’hôtel de Ségur au 97 de la rue du Bac, se poursuit jusqu’en 1841. Il s’ouvre sur une épître dédicatoire en vers de la main de Constance de Salm (publiée en 1842 dans les Œuvres complètes sous le titre "Stances écrites en tête de l’album de l’auteur") priant ses amis de le remplir sous peine de l’affliger. S’y mêlent poèmes, compliments, musique notée, romances, chansons et dessins, témoignages d’amitié et d’admiration.
Femme de lettres accomplie, féministe engagée et épistolière invétérée, Constance reçoit une éducation soignée. Très jeune, elle publie des poèmes dans diverses revues littéraires (Almanach des Grâces, Almanach des Muses, Revue encyclopédique, La Décade philosophique, etc.). En 1793, en pleine Terreur, elle compose sa première tragédie lyrique, Sapho, mise en musique par Martini et jouée pour la première fois le 17 décembre 1794 au théâtre des Amis de la Patrie. Le succès de Sapho révèle la jeune Constance et le milieu artistique salue rapidement ses qualités littéraires. En 1795, elle est la première femme admise au Lycée des arts.
Très engagée, elle participe à la querelle déclenchée par Écouchard-Lebrun dit Lebrun-Pindare. Farouche adversaire de l’émancipation féminine, le poète, dans son Ode aux belles qui veulent devenir poètes, supplie les femmes de ne pas écrire et de s’en tenir à leur rôle d’inspiratrice. En 1797, Constance réagit avec verve et publie son Epître aux femmes, les invitant à "secouer des chaînes si pesantes".
L’œuvre de la princesse de Salm, essentiellement poétique, compte un seul roman, Vingt-quatre heures d’une femme sensible (1824), roman épistolaire qui inspira Stefan Zweig pour Vingt-quatre heures de la vie d'une femme, publié pour la première fois en 1927.
Les nombreuses épîtres de la princesse de Salm lui valent le surnom de "Boileau des femmes". En 1833 paraissent ses mémoires (Mes soixante ans, ou Mes souvenirs politiques et littéraires) et en 1843, ses Œuvres complètes publiées par Firmin Didot.
Séparée de son premier mari, le médecin Jean-Baptiste Pipelet, Constance épouse en 1803, Joseph de Salm-Reifferscheidt-Dyck dont elle partage le goût prononcé des arts et des sciences. À Paris, dans leur élégant hôtel de la rue du Bac, au château de Dyck en Rhénanie ou à Aix-la-Chapelle, elle aime recevoir et s’entourer de nombreux amis. Celle que Marie-Joseph Chénier, frère cadet d’André, surnommait la "Muse de la raison" tient un salon littéraire très prisé réunissant les grands noms de l’époque : écrivains, peintres, sculpteurs, scientifiques, musiciens, hommes politiques, etc.
De nombreux personnalités figurent dans les pages de cet album, louant tour à tour, en vers ou en prose, la grâce, la beauté, l’esprit et les talents de leur hôtesse. Relevons les noms d’Alexandre Dumas père (poème Le Sylphe, p. 199), James Fenimore Cooper (p. 199), Louis Gohier, Pierre-Paul Raboteau, le dermatologue Jean-Louis Alibert, Jean-François Ducis, Anne-Louis Girodet, Jean-Baptiste Houel, Marie-Joseph Chénier (p. 53), le botaniste Leschenault de La Tour (p. 77), Benjamin Constant (p. 124), Lafayette (p. 248), Vivant Denon, Jussieu, Candolle, Bernardin de Saint-Pierre (p. 280), Carle Vernet, Jean-Pierre Houel, Lagrenée, Abraham-Louis Breguet, Firmin Didot, Berthollet, Dupont de Nemours, Paul-Louis Courier, Amaury-Duval, Alexandre de Humboldt (p. 93), Jean-Baptiste Say, etc.
Parmi les musiciens, se côtoient Jean-Paul-Égide Martini, qui mit en musique Sapho (Romance de l’opéra de Sapho, p. 10-11), Cherubini (Canon rétrograde à 2 voix, p. 220-221) et André Grétry.
Deux princesses musiciennes laissent, lors d’un séjour à Aix-la-Chapelle en 1812, deux pièces de musique notée : Pauline Borghèse (Paroles tirées de Métastase mises en musique par son Altesse Impériale la princesse Pauline Borghèse et écrite par elle sur cet album, p. 142-143) et Hortense de Beauharnais (Romance mise en musique par Sa majesté la Reine de Hollande et écrite par elle sur cet album, p. 154-155). Enfin, Clémence Pipelet met en musique une chanson écrite à sa mère (p. 86-87) ; Clémence, née en 1790 du premier mariage de Constance, avait épousé en 1813 Louis Bernard Francq (1766-1818), colonel de chasseur à cheval de la Garde impériale et baron de l’Empire en 1810.
Plusieurs femmes de lettres et salonnières, ardentes championnes de la cause féminine, figurent parmi cet aréopage de célébrités. Aujourd’hui quelque peu oubliées, elles brillèrent en leur temps : Sophie Gay (Couplets sur l’absence, p. 55) et sa fille Delphine qui épousera Émile de Girardin ; Adélaïde-Gillette Dufrenoy (Le Bonheur, p. 47), Fanny Raoul qui publia en 1801, avec le soutien de la princesse de Salm, Opinion d’une femme sur les femmes (La Prairie et le Ruisseau allégorique, p. 38-39), Sophie de Bawr (Couplet, p 49) et Victoire Babois, nièce de Ducis, (Tiré de l’épître à Clotilde de Surville, p. 303).
66 dessins, la plupart signés, dont 41 portraits, illustrent l’album [liste ci-dessous]. Le premier est une aquarelle du prince de Salm, botaniste averti, représentant un géranium (p. 6). Parmi ces dessins, notons ceux de l’architecte Antoine-Laurent Vaudoyer (Temple de la poésie, lavis de sépia, signé et daté 1809, p. 63) et du peintre Jean-François Lagrenée (29 portraits légendés, non signés, au lavis de sépia, sur 15 feuillets représentant notamment le prince et la princesse de Salm, Naigeon, Vaudoyer, Lagrenée, Girodet, Cherubini, etc., p. 158-186). Vaudoyer et Lagrenée remirent au goût du jour, en 1809, l’appartement du premier étage de l’hôtel de Salm-Dyck. Citons encore un lavis signé de Girodet (Hommage à Constance de Salm, daté du 1er mai 1819) ; une aquarelle signée de Pancrace Bessa représentant une tulipe (datée 1812) ; une aquarelle signée de Carle Vernet représentant un cheval ailé (accompagnée de quelques lignes de la main du peintre : "J’ai pensé qu’un cheval pour madame de Salm ne pouvoit aller sans ailes. Je lui demande son indulgence pour ce léger croquis, et je la prie de croire qu’il n’a pas non plus été fait sans zèle", datée du 6 mai 1809, p. 98-99) ; une aquarelle signée de Fanny Vernet, épouse de Carle Vernet (représentant Ali-Astrakan, envoyé Persan, datée du 6 mai 1809) ; un sépia de Pajou, fils du statuaire (p. 105) ; six portraits au lavis par Jean-Claude Naigeon (dont Pierre-Louis Guinguené, Gaspard Monge, Jean-Paul-Égide Martin (feuillets E, F et G) ; un dessin à l’encre de Chine signé de Joseph-Marie Vien (feuillet H) ; un portrait au crayon de Lord Byron (feuillet N) ; un dessin à l’encre de Chine signé de Vivant Denon (daté 1811, p. 139) ; une esquisse au crayon sur papier calque, contrecollée, représentant 22 profils (Courier, Girodet, Talma, Houdon, etc.) et très probablement un dessin préparatoire d’Antoine Chazal pour "Une soirée chez la princesse de Salm", gravé par Ambroise Tardieu, illustrant le tome II des Œuvres publiées en 1842.
Le souvenir d’Alexandre de Théis, père de Constance, est précieusement conservé pages 328 et 329 sur lesquelles ont été contrecollés quelques vers de sa main à la gloire de sa fille (Acrostiches à ma fille).
L’album se clôt sur des vers écrits en septembre 1873 à la mémoire de Constance de Salm, décédée en 1845, par Auguste Paul Louis de Saint-Cricq qui avait épousé sa nièce Joséphine de Théis.
Provenance : ex-libris gravé aux armes du baron de Franck et possiblement de son épouse, Clémence Pipelet, fille de la princesse de Salm. – Raphaël Esmerian (ex-libris). – Docteur Jean-François Lemaire (ex-libris).
Détail des dessins :- Aquarelle représentant un géranium. Signé du prince de Salm-Dyck et daté "Dyck ; 1809" portant l’inscription manuscrite "offert à ma femme" (p. 6).
- Plume et lavis d'encre noire. Signé de J.-P. Houel et daté 1809. Scène de pêche côtière (p. 27).
- Plume et lavis d'encre noire. Signé de Delamardelle et daté de 1809 : Vue d’Olmedo en Espagne (p. 33).
- Plume et lavis d'encre brune sur traits de pierre noire, rehauts de gouache blanche. Signé de Vaudoyer et daté 1809. Temple de la poésie sur le mont Parnasse, avec légende en regard (p. 63).
- Plume et lavis d'encre brune et noire, par A. Girodet. Daté "1er mai 1809". "Hommage à Madame Constance de Salm" (p. 73).
- Dessin au graphite légendé. Non signé, par Leschenault. Habitations de l’île de Java (p. 77).
- Aquarelle représentant une tulipe par Pancrace Bessa. Signé et daté "Paris, 1812" [feuillet non chiffré].
- Aquarelle de M. de Guigny représentant une porte monumentale en Chine. Daté "Paris, 20 avril 1810" (p. 91).
- Aquarelle signée de Carle Vernet représentant un cheval ailé et accompagné de quelques lignes de la main du peintre, datée "Paris, ce 6 may 1809" (p. 98-99).
- Lavis d'encre brune. Signé "Pajou, fils du statuaire" et daté 1811. Scène allégorique (p. 105).
- Aquarelle sur trait de graphite. Signé de Fanny Vernet, épouse de Carle Vernet, et daté du 6 mai 1809, représentant l'envoyé persan Ali-Astrakan (p. 115).
- Plume et encre noire, avec rehauts de gouache blanche sur calque contrecollé. Signé "Denon f." et daté 1811. Couple avec nourrisson (p. 139).
- Pierre noire et sanguine brûlée, plume et encre noire. Signé de F. Dumont. Portrait de Voltaire (p. 147).
- Aquarelle, plume et encre brune, lavis encre brune. Signé de Fanny Gumppenberg, née comtesse de Salm. Fleurs (p. 151).
- 29 portraits de Lagrenée le Jeune, encre sépia, plume et lavis sur 15 feuillets représentant le prince et la princesse de Salm, Naigeon, Vaudoyer, Lagrenée, Girodet, Cherubini, etc. (p. 158-186) sous serpentes roses.
- 3 portraits à l’aquarelle de Johns, dont un représentant Constant de Francq. Signés (feuillets A, B et C).
- Aquarelle, plume et encre noire. Non signé, contrecollé. Ruine et paysage (feuillet D).
- 6 portraits, plume et lavis noir et une esquisse au crayon, par Naigeon sur trois feuillets (E, F et G).
- Encre et lavis noir. Signé "Vien fils", contrecollé. Femme cousant (feuillet H).
- Aquarelle, par Charles prince de Wied. Légendé, signé et daté "1er mai 1812". Vue de San Salvador du Brésil (feuillet I, verso).
- Plume et lavis brun, par Maximilien prince de Wied. Légendé et signé. Paysage lacustre (feuillet L).
- Esquisse au crayon sur papier calque contrecollé représentant 22 profils (Courier, Girodet, Talma, Houdon, etc.). Dessin préparatoire d’Antoine Chazal pour "Une soirée chez la princesse de Salm" qui sera gravé par Tardieu.
- Graphite. Non signé, contrecollé. Portrait de Lord Byron (feuillet N).
- Lavis gris. Non signé. Constance de Salm de profil (feuillet N).
- Pierre noire et aquarelle. Non signé. Couple avec deux enfants (feuillet P).
- Lavis brun sur trait de pierre noire. "Vue du Pont de 560 pieds d’ouverture sur le bras de mer près de Banger, route de Londres à Dublin". Signé "le Br de Gumppenberg" (feuillet Q verso).
- Lavis noir et brun, avec aquarelle rouge. Légendé, signé et daté " A. Letronne, élève de Mr Mentelle. mai 1812". "Machine dont on se sert à Naples pour dérouler les papiry" (feuillet R).
- Plume et lavis noir. "Dessiné par Mlle Isabelle Lenders [?]". Château de Dyck (feuillet S).
- Pierre noire et sanguine. Signé à la plume par F. Dumont. Portrait de Marie-Antoinette (feuillet T).
- Aquarelle sur trait de pierre noire, plume et encre. Signé Naigeon et daté 1812. Erato attirant les beaux-arts par les charmes de sa lyre (p. 315).
- Plume et encre noire, pierre noire et aquarelle. Signé de Charles de Théis et daté "Dyck, le 3 nov. 1823" avec un envoi en vers : "à ma tante..." (p. 321).