Livres et Manuscrits
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Lot Closed
June 30, 12:48 PM GMT
Estimate
10,000 - 15,000 EUR
Lot Details
Description
COCTEAU, JEAN
ULYSSE ET LES SIRÈNES.
1951.
Huile sur toile.
Signée "Jean" avec son étoile caractéristique, datée 1951 en bas à gauche.
146 x 114 cm.
Jean Cocteau décrit ainsi cette toile dans le catalogue de son exposition de Nice en 1953 : "Ulysse s'est fait attacher à un mât et mettre de la cire dans les oreilles. Un matelot couché a enfoncé son bonnet sur ses oreilles. Les sirènes bondissent, chantent, s'étonnent de leur insuccès. L'une d'elle arrive de loin à toute vitesse."
"Les sirènes, jalouses des hommes, cambrent leurs reins d'hippocampe pour séduire le sage Ulysse."
Cette toile a été transposée en tapisserie par les Ateliers d’Aubusson. Elle est également reproduite en couleurs dans Démarche d'un poète, p. 32.
En 1953, dans Démarche d’un poète, "Cocteau consacre un chapitre à l’acte de peindre, que Cocteau sépare très fortement de l’acte de dessiner. S’il dessine depuis toujours, le poète est venu très tard à la peinture sur toile, durant l’hiver 1950. Il réalise alors une vingtaine de toiles en six mois, inaugurant ainsi une nouvelle direction de son œuvre. Sans doute y a-t-il là pour lui, pendant longtemps un domaine interdit, réservé à ce père suicidé quand il était enfant et sur lequel il reste très silencieux. Démarche d’un poète l’évoque brièvement : "De lui surtout me reste le souvenir très vif d’une odeur de palette et d’huile que je trouvais délicieuse. Il peignait avec beaucoup d’aisance. Je restais assis près de sa chaise". Par ailleurs, si Cocteau a souvent écrit sur la peinture des autres, sa fréquentation des grands peintres et surtout son admiration sans bornes pour Pablo Picasso ont certainement contribué à retarder son passage à l’acte pictural". " (Jean Cocteau peintre, Montpellier, Bibliothèque Interuniversitaire).
Expositions :
- Jean Cocteau. Gemälde, Andteppiche, Eichnungen. Bayerische Staatsgemäldesammlungen Munchen. Haus der Kunst. Munich , Janvier à mars 1952, n° 21.
- Jean Cocteau : Tapisserie, Peintures, Dessins. Galerie des Ponchettes, Nice, 9 février-8 mars 1953.
- Jean Cocteau le Mythologue. Maison Jean Cocteau de Milly-la-Forêt, exposition du 2 avril 2016 au 17 décembre 2017, reproduit p. 5.
- Plusieurs étiquettes d'expositions figurent sur le châssis dont : Tokyo (n° 116) ; Le Triomphe des Champs Elysées / Hommage à Jen Cocteau ; Bunkamura museum, Tokyo 1951 (Association des Amis du Musée) ; Tokyo (n° 116) ; Jean Cocteau et la Grèce, 1951 ; ainsi que des étiquettes d'acheminement de la maison Chenue.
Provenance : Succession Stéphane Dermit.
Un certificat du Comité Jean Cocteau sera remis à l’acquéreur.
"Je me suis mis à peindre par fatigue de l’encre et par un besoin de changer de véhicule, d’expulser ce qui m’encombre par d’autres portes. Je me suis mis à peindre parce que j’avais découvert que l’acte de peindre nous sort de nous-mêmes au point de nous anesthésier, de nous rendre insensibles à ce qui n’est pas le tableau." (Jean Cocteau, Démarche d’un poète, 1953.)
C’est un événement important pour les collectionneurs de Jean Cocteau, qu’ils soient bibliophiles ou amateurs de dessins et peintures de l’artiste, que la dispersion de neuf œuvres de l’artiste, quatre huiles sur toile et cinq techniques mixtes sur carton.
Ses premières huiles ont pour thème des sujets empruntés à la Bible ou à la mythologie comme le montrent les quatre huiles présentées ici.
Elles sont exceptionnelles tant par leur provenance que par leur rareté et leurs tailles.
Leur provenance, d’abord, est importante, car elles sont restées dans la "famille" depuis leur création, famille à la manière de Cocteau, famille "de cœur" comme le dit joliment Carole Weisweiller, la fille de Francine, grande amie de Cocteau. L’écrivain avait adopté Edouard Dermit à la fin des années 50 et en avait fait son légataire universel. Au décès de Cocteau, sans qu’il y ait une vente de succession, tout ce que l’artiste possédait est revenu à Dermit puis à ses deux enfants Stéphane et Jean. Et ce sont maintenant les deux enfants de Stéphane qui proposent ces neuf œuvres aux enchères.
La rareté de ces œuvres est également à souligner. Il est difficile d’évaluer le nombre d’huiles sur toile peintes par Cocteau, mais il semble juste de dire quelques dizaines. Carole Weisweiller nous dit que Cocteau a commencé à peindre à l’huile en 1951 quand Francine Weisweiller, sa mère, a décidé de transformer la serre de sa maison Santo Sospir de Saint Jean Cap Ferrat en un atelier pour l’artiste. À ce moment Weisweiller, Dermit et Cocteau se sont mis à peindre, souvent ensemble. Cocteau a continué de façon intermittente jusqu’à sa mort en 1963. Nous avons vu quelques toiles dans la vente de la succession Jean Marais, il y en a au musée Cocteau de Menton et il en reste quelques-unes chez quelques collectionneurs que l’on compte sur les doigts des deux mains. Le centre Pompidou possède une huile sur carton "Sommeil hollywoodien", 1953.
Enfin, la taille des œuvres est exceptionnelle, particulièrement celle des quatre huiles sur toile. Cocteau avait toujours besoin de dessiner, il dessinait comme il respirait, sur tout ce qu’il avait sous la main. Et il y a des centaines de dessins. Mais pour peindre sur toile, et en grand format, il fallait un atelier, des supports, des tubes de peintures, des outils... toutes choses qu’il n’avait pas dans le minuscule appartement de la rue Montpensier à Paris, ni même dans la petite maison de Milly-la-Forêt. On peut certainement dire que Cocteau aimait ces neuf œuvres, il les a gardées à Milly, rarement montrées. Quant à Edouard Dermit il les a très peu prêtées, seulement à quelques musées choisis, jamais vendues.
Je pense sincèrement que nous avons, avec cette vente chez Sotheby’s, une opportunité qui ne se reproduira sans doute pas, de pouvoir choisir entre neuf œuvres significatives du talent de Jean Cocteau.
Patrick Martin
Expert de l’œuvre graphique de Jean Cocteau Comité Cocteau. Paris.