Lot 172
  • 172

Proust, Marcel

Estimate
3,000 - 5,000 EUR
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Description

  • Proust, Marcel
  • Lettre autographe signée à Reynaldo Hahn. [Mars 1912 ?]
  • ink on paper
4 p. in-12 (171 x 110 mm), sur bifeuillet. Adressée à "Mon cher petit Ginibuls", elle est signée "Marcel".

"Tu sais que tu es toujours avec moi, que je te fais toute la nuit la conversation, ce serait donc assez peu de te dire que je pense à toi."



Lettre intime dans laquelle Proust tutoie Reynaldo, au sujet d’une lettre qu’il a reçue de lui et qui l’a bouleversé, probablement à propos de la santé de Mme Carlos Hahn (voir lot 173) : "Je ne peux pas te répondre de peur que ma lettre ne soit lue comme tu es si peu ordonné. Mais le coup que la tienne m'a donné a été d'autant plus terrible que avant-hier je t'ai téléphoné sans que tu me dises rien du tout de cela". Il a cru un instant que Reynaldo s’était trompé de correspondant : "le style de ta lettre a l'air d'impliquer une autre. Tu sais que tu es toujours avec moi, que je te fais toute la nuit la conversation, ce serait donc assez peu de te dire que je pense à toi."
Il le met ensuite en garde contre les indiscrétions téléphoniques possibles. Il a répondu au téléphone un soir après lui avoir parlé, soir où “on m'a un peu après appelé sans arrêter […] Mais enfin pour tâcher de voir qui m'appelait j'ai mis le cornet à mon oreille et j'ai entendu la belle voix grave de mon Buncht qui disait : 'les Fauchier Magnan sont des horreurs' à qui une voix comme écorchée et agréablement juteuse de sève que j'ai cru reconnaître pour celle de Peter [René Peter, camarade d’enfance avec lequel Proust renoue lorsqu’il séjourne à l’Hôtel des Réservoirs à Versailles d’août à décembre 1906, après la mort de sa mère] disait quelque chose comme: 'Mais Reynaldo'. J'ai raccroché […] Et faites bien attention à ne pas dire des choses du genre de celles que vous m'avez écrites."
Le lendemain, il poursuit : "Bonjour encore mon petit Bugnibuls. Quand je pense que je t'ai chanté tant ces nuits-ci sans savoir, et raconté des frivolités. Je ne peux pas me décider à te dire hasdieu et je voudrais tout le temps te récrire. Adieu mon cher petit Genstil qui ne comprend pas pourquoi je n'ai pas pu regarder Zadig et qui a cru que c'était de l'indifférence. Mais pour d'autres choses tu me comprends […] Adieu mon genstil. Brûlez lettre mon genstil tout de suite". Ce que, de toute évidence, Reynaldo ne fit pas !



Provenance : Marie Norlinger (Drouot, 15 et 17 décembre 1958, lot 241).



Références : Kolb, XI, n° 31. -- Hahn, n° CXLIV, p. 222-223.