Lot 20
  • 20

NICOLAS POUSSIN | Studies of an imperial throne and a vase

Estimate
80,000 - 120,000 EUR
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Bidding Closed

Description

  • Nicolas Poussin
  • Studies of an imperial throne and a vase
  • Plume et encre brune, lavis brun, traces d’un encadrement à la sanguine en bas à gauche ;
    Inscription à la plume et encre brune, de la main de Poussin, à droite à mi-hauteur : sedes impodorale (siège impérial ?) ;
    Porte une attribution à la pierre noire, en bas à droite : G. Poussin, et un numéro, à l’encre brune, au verso : a. 65.
  • 297 x 196 mm

Provenance

Jean-Baptiste Florentin Gabriel de Meyran, marquis de Lagoy (1764-1729), Aix-en-Provence (L.1710, en bas à droite) ;
Comte Moritz von Fries (1777-1826), Vienne (L.2903 en bas à gauche ; cent cinquante des meilleurs dessins de sa collection furent acquis par Lawrence vers 1820) ;
Sir Thomas Lawrence (1769-1830), Londres (L.2445 en bas à droite) ;
Probalement Samuel Woodburn (1786-1853), Londres ;
Peut-être William Coningham (1815-1884), Brighton (L.476) ;
Acquis en mars 2003 par le collectionneur d'une collection particulière française formée au milieu du XIXe siècle.

Exhibited

Rennes, 2012, n°36 (notice par Louis-Antoine Prat) ;
Sceaux, 2013 (sans catalogue)

Literature

P. Rosenberg, "Un ensemble de copies de dessins d'après l'antique de Poussin", Studiolo, n°4, 2006, p.137, note 18, p.140, sous « feuillet 56 », fig.34 p.158

Condition

Hinged to mount with japan paper tabs, and with further tabs attached on three sides, to facilitate handling. Some light foxing and surface dirt. Slightly discoloured towards edges, presumably from former mounting to album sheet. Overall condition nonetheless good and fresh. Sold unframed.
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Catalogue Note

Cette belle étude de deux objets antiques, un trône et un vase, est apparue environ dix ans après la publication du catalogue raisonné des dessins de Poussin établi par Pierre Rosenberg et Louis-Antoine Prat1. Elle constitue une rare addition au tout petit corpus existant d’études de l’artiste d’après l’antique, œuvres particulièrement importantes et influentes. L’admiration de Poussin pour l’antiquité classique est aisément visible dans chacun des aspects de son style, et il considérait le passé, dans lequel il incluait non seulement l’art romain mais aussi les œuvres de Raphaël et Giulio Romano, comme les bases essentielles de la formation d’un artiste.

Environ quatre-vingt de ses dessins d’après l’antique sont connus, mais étonnamment il s’est avéré que nombre d’entre eux, si ce n’est la plupart, étaient en réalité des copies d’après des gravures ou des dessins, plutôt que d’après les pièces originales, qu’il aurait pourtant eu largement l’occasion d’étudier lorsqu’il était à Rome. Comme l’a aimablement fait remarquer Florent Heintz, la partie supérieure du dessin de la collection Adrien est une étude de la partie gauche d’un trône romain, aujourd’hui conservé à la Glyptothek de Munich (fig. 1). Nous remercions également Rea Alexandratos de la Royal Collection de nous avoir indiqué que ce trône était connu depuis le début du XVIe siècle, qu’il avait été découvert dans les ruines d’un bâtiment situé à proximité de l’église romaine de San Giovanni e Paolo, et qu’à l’époque de Poussin il se trouvait dans la collection Mattei – à laquelle Poussin aurait probablement pu avoir accès – exposé au pied de l’escalier principal dans le Palazzo Mattei di Giove. En tant que pièce renommée de l’antiquité, le trône fut représenté dans au moins trois dessins du XVIe siècle illustrant des motifs d’après l’antique, à Cassel (fig. 2), Berlin et Florence2. Il apparaît aussi dans l’un des nombreux dessins sur ce thème faits par Pietro Testa pour le Museo Cartaceo (« le Musée de papier ») de Cassiano dal Pozzo ; le dessin est désormais conservé à la Royal Collection à Windsor Castle3. Poussin était étroitement lié au cercle de Cassiano et, s’il n’effectua pas son dessin d’après le trône original, il est probable qu’il l’ait fait d’après celui de Testa de Windsor.


Il est vraiment surprenant de voir à quel point Poussin semble avoir choisi de réaliser ses dessins de sculptures et d’objets antiques d’après des dessins ou des gravures faits par d’autres artistes, plutôt que d’après les originaux. Environ treize des feuilles d’études d’après l’antique cataloguées par Rosenberg et Prat font en réalité référence à des images gravées de la Galleria Giustiniani, le catalogue de la collection d’antiques de Vincenzo Giustiniani, paru en 1631. Une variante du trône représenté ici se trouve d’ailleurs sur la planche CXXXIII. Aucun prototype sculpté, dessiné ou gravé n’a pu être trouvé pour le vase situé dans la partie inférieure du présent dessin. Cette partie de la composition a cependant été copiée dans un dessin anonyme aujourd’hui au Louvre (Inv. 32509), ainsi que sur le folio 56 d’un album de copies d’après Poussin, que Rosenberg a surnommé l’Album Louviers d’après le lieu où il a été découvert.


Les dessins de Poussin de ce type sont généralement considérés comme ayant été réalisés après le retour de l’artiste à Rome (après un séjour à Paris), vers 1642-1645. Il semble les avoir exécutés pour son propre compte, comme l’écrit Rosenberg : « les dessins de Poussin constituèrent un garde-manger, un réservoir dans lesquels l'artiste puisa régulièrement pour tel détail de ses tableaux, pour telle idée de ses compositions4 ».


Après le décès de Poussin en 1665, un grand nombre de ces copies d’après l’antique se trouvaient entre les mains de son secrétaire Jean Dughet, qui mit en vente un album de ces dessins en 1678 avec la description suivante : « Un libro di disegni fatti da monsieur Poussin, cioe dal antico... per suo studio », suggérant ensuite qu’ils pouvaient être gravés pour les bienfaits du public et pour la formation des étudiants français, hollandais et flamands5. On ne sait pas précisément à quelle date cet album a été démantelé, mais les dessins qui en sont issus sont reconnaissables au trait d’encadrement à la sanguine qui se trouve autour, et dont une trace est visible sur la présente feuille, au bord inférieur gauche. Comme l’a indiqué Pierre Rosenberg, deux recueils de copies anonymes d’après les dessins de l’album Dughet existent, connus sous les noms de Album de Louviers et de Carnet de Rome. Ils permettent de mieux appréhender le contenu original de l’album qui se trouvait dans la collection de Jean Dughet.6

Ce superbe dessin est caractéristique du style graphique de Poussin, avec ses traits minutieux et son lavis brun largement appliqué mais brillamment nuancé. Peut-être plus qu’aucun autre artiste de son époque, Poussin contrôlait si bien son média, qu’il était capable de produire des dessins qui étaient non seulement des représentations très précises de leur sujet, mais qui étaient aussi merveilleusement harmonieux et élégants.

1. P. Rosenberg and L.-A. Prat, Nicolas Poussin, Catalogue raisonné des dessins, 2 vols., Milan 1994

2. Kassel, Museumslandschaft Hessen Kassel, Graphische Sammlung, Codex Fol. A45, fol. 54 recto; Berlin, Kunstbibliothek, Codex Destailleur A, fol. 63 recto; Florence, Uffizi, inv. 1954 A verso

3. Windsor Castle, Royal Library, inv. RL 8395

4. Rosenberg, op. cit., 2006, p. 136

5. Idem., p. 134

6. Idem., pp. 129-166