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Pierre Soulages
Description
- Pierre Soulages
- Peinture 162 x 130 cm, 14 avril 1962
- signé; signé, daté 14 avril 62 et daté 1962 au dos
- huile sur toile
- 162 x 130 cm; 63 3/4 x 51 3/16 in.
- Executed in 1962.
Provenance
Collection particulière
Vente: Sotheby's, Londres, Contemporary Art Evening Sale, 6 décembre 1990, lot 28
Collection particulière, Suisse
Exhibited
Paris, Musée National d'Art Moderne, Soulages, 22 mars - 21 mai 1967; catalogue, illustré
Montréal, Musée d'Art Contemporain; Québec, Musée du Québec, Soulages, 23 juillet - 21 octobre 1968
Literature
James Johnson Sweeney et Pierre Daix, Pierre Soulages, Neuchâtel, 1991, pp. 108, no. 203, illustré
Pierre Encrevé, Soulages, L'Oeuvre Complet, Peintures, Volume II, 1959-1978, Paris, 1995, no. 489, pp. 104-105, illustré en couleurs
Condition
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Catalogue Note
Bernard Ceysson, Soulages, Paris, Flammarion, 1979, p.81
Toile majeure du début des années 1960, Peinture 162 x 130 cm, 14 Avril 1962 est révélatrice de cette formidable période de la carrière de Soulages pendant laquelle s’opère un changement majeur, les signes relativement statiques des premières années cédant la place à une tension nouvelle et définitive qui ne cessera dès lors de s’affirmer. La forme se lie désormais à la couleur, à la matière, ajoutant une dimension inédite à l’œuvre du peintre. Une dimension sensible qui témoigne de l’énergie créatrice inouïe qui anime alors Soulages.
Issu d’une famille très modeste, Pierre Soulages a passé son enfance à dessiner à l’encre noire, sa mère n’ayant pas les moyens de lui offrir des couleurs. Ce n’est que beaucoup plus tard qu’il put commencer à expérimenter le bleu qui est, selon lui, la véritable couleur de la lumière. Ce n’est qu’au tournant des années 1950 que l’azur s’impose dans la peinture du maître, dévorant la toile dans des chefs d’œuvre tels que Peinture 195 x 130, 20 juillet 1956, Peinture 195 x 130, 30 octobre 1957, respectivement propriétés du Milwaukee Art Museum et de la National Gallery of Art de Washington, et Peinture 195 x 130 cm, 21 novembre 1959, record du monde établi chez Sotheby’s à Londres en Juin 2013 (6 651 081 de dollars). Fin 1959, la palette de Soulages s’obscurcit au profit d’un noir profond, le bleu disparaissant l’espace de trois années avant de réapparaître sous toute sa splendeur le 14 avril 1962, jour où il peint justement Peinture 162 x 130 cm, 14 Avril 1962. Et, comme souvent avec lui, il semble que ce soit à la seconde tentative que l’artiste arrive à toucher du doigt le génie.
Peinture 162 x 130 cm, 14 Avril 1962 illustre ainsi parfaitement la virtuosité avec laquelle Soulages structure les vides et les pleins, tout en nuances, faisant surgir la flamme là où on ne l’attend pas. Le lapis lazuli renforce un mouvement aussi doux que poétique et majestueux. Le noir, présent çà et là en touches éparses, prend un tout autre sens. Les jeux de lumière, l'architecture de la structure monumentale, le travail des transparences chromatiques renforcent encore un peu plus le mystère qui plane sur cette composition. Il y a du volume, de l’espace et du temps. Mais aussi quelque chose d’insaisissable et d’énigmatique, qui semble venir d’aussi loin que le feu et la glace.
Le début des années 1960, c’est aussi l’époque où Soulages s’impose comme l’un des chefs de file de sa génération, non seulement en France et en Europe mais aux Etats-Unis, où il est représenté par Sam Kootz au même titre que Mark Rothko, Willem de Kooning ou Robert Motherwell. Entré dans la collection Phillips de Washington dès 1951, dans celle du Museum of Modern Art de New York et dans celles de Nelson A. Rockefeller, Otto Preminger ou Alfred Hitchcock, Soulages est perçu comme le fer de lance européen de l’expressionnisme abstrait américain. A Paris, c’est la fameuse Galerie de France qui le défend. A l’occasion d’une exposition au grand retentissement que ses directeurs Gildo Caputo et Myriam Prévot organisent, le philosophe Jean Grenier propose une lecture du travail de Soulages de ces années-là très à propos pour Peinture 162 x 130 cm, 14 Avril 1962 : "Voilà que viennent à la surface des excavations ignorées, des couleurs englouties, comme de violents séismes arrachent au fond des mers les terres volcaniques et en font de nouvelles îles. Ainsi la seule répétition des mouvements de brosses dessine et révèle ce qui était perdu et éclaire le reste. (…) Les degrés d’une couleur enfouie et disparue résonnent alors comme le pas dans un souterrain et baignent l’ombre monumentale d’une lumière douce et caressante."
Comme le dit lui-même Soulages, "plus les moyens sont limités, plus l’expression est forte."