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Pierre Soulages
Description
- Pierre Soulages
- Peinture 195 x 130 cm, 7 mars 1958
- signé
- huile sur toile
- 195 x 130 cm ; 76 3/4 x 51 3/16 in.
- Exécuté en 1958.
Provenance
Acquis aurpès de celle-ci par le propriétaire actuel
Literature
Condition
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Catalogue Note
The English translation of this note follows the French
Notice de catalogue
Collection Niomar Moniz Sodré Bittencourt
Fille de journaliste et homme politique connu pour ses positions progressistes et née à Salvador, dans le nord-est du Brésil, alors que la Première Guerre mondiale battait son plein, Niomar Moniz Sodré Bittencourt (4.09.1916 – 31.10.2003) était certainement prédestinée à devenir l’une des figures de proue de l’avant-garde de son temps et de la lutte pour la liberté d’expression sous la dictature militaire qui sévit au Brésil entre 1964 et 1985. Grande collectionneuse, Niomar Sodré fut aussi l’amie des plus grands artistes de l’après-guerre, soutien indéfectible à la création contemporaine et co-fondatrice du Musée d’Art moderne de Rio, l’un des premiers d’Amérique latine à faire la promotion de l’art moderne européen dont la collection disparut dans un tragique incendie en 1978.
Dès l’adolescence, Niomar Sodré commence à écrire. Des pièces de théâtre, des poèmes, des nouvelles… Avant d’embrasser la carrière de journaliste et de faire ses armes au Correio da Manhã. C’est là qu’elle rencontre l’homme qui va changer sa vie, Paulo Bittencourt, alors aux commandes de ce grand quotidien démocrate. Tous deux passionnés d’art et fervents défenseurs de la liberté d’expression, Niomar Sodré et Paulo Bittencourt se ressemblent. Un an après leur rencontre, ils se marient. Ensembles, ils se battent pour que Rio, comme New York, ait son propre musée d’art moderne. Ce sera chose faite avec la création du Musée d’Art moderne de Rio à la fin des années 1940. Au cours des années qui suivront, sous la direction puis la supervision de Niomar Sodré qui en fut successivement directrice puis présidente, le MAM devient un lieu de rassemblement culturel et s’impose en tant qu’espace de formation des jeunes artistes et d’expérimentation des nouvelles formes d’expression visuelle. En parallèle de son action au Brésil, Niomar Sodré se rend fréquemment en Europe et aux Etats-Unis où elle rencontre Soulages, Arp, Giacometti, Morandi, Brancusi, Staël, Dubuffet, Vieira da Silva ou encore Duchamp. Elle bâtit une admirable collection pour le musée, mais aussi pour elle et son mari. Collections qui auront un destin tragique, partant presqu’en totalité en flammes dans un incendie qui se déclara au MAM en 1978 et dans l’appartement Niomar Sodré sept ans plus tard.
Aujourd’hui, alors que les chefs d’œuvre du MAM, dont plusieurs Matisse, Magritte, Dali, Klee, Miro, Pollock ou encore Rivera ont disparu, comme ceux de l’appartement carioca de Niomar Moniz Sodré Bittencourt parmi lesquels figuraient des toiles d’une valeur inestimable signées Picasso, Rothko ou Mondrian ; seules quelques œuvres de la collection Sodré sont parvenues jusqu’à nous. Peinture 195 x 130 cm, 7 mars 1958 est ainsi une œuvre historique a plus d’un titre, étant non seulement une toile prodigieuse d’un de plus grands maîtres de l’art de la seconde partie du XXe siècle mais aussi le témoignage, presque le reliquat, de la collection de la grande Niomar Moniz Sodré Bittencourt.
Peinture 195 x 130 cm, 7 mars 1958
Cette toile majeure des dernières années de la décennie 50, est parfaitement caractéristique du travail de Soulages à son retour de son premier « tour du monde ». Venus à New-York au début de novembre 1957 pour sa quatrième exposition personnelle à la Kootz Gallery, Soulages et sa femme reçurent un accueil très chaleureux, avec réception au Moma et au Guggenheim et nombreuses « parties » privées, nouant amitié avec la plupart des expressionnistes abstraits de New-York. Ils partirent de là, avec leur ami Zao Wou Ki, pour le Japon, où Soulages devait recevoir le prix de la Biennale de Tokyo, et ne revinrent à Paris qu’au premier jour de mars 1958 après être passés par la Thaïlande, le Cambodge, l’Inde, le Pakistan, le Liban, la Turquie, Athènes et Rome. A Paris les attendait le nouvel atelier de Soulages, un très vaste espace au troisième étage d’une maison ancienne du Quartier latin, ses larges fenêtres donnant sur Notre-Dame. Soulages reprend immédiatement la peinture et le 7 mars il réalise cette grande toile : un chef d’œuvre immédiat, comme s’il voulait y inscrire d’emblée toute l’énergie de ces quatre mois de voyage et toute l’impatience aussi de peindre à nouveau. On y retrouve les éléments caractéristiques des œuvres de l’année précédente, notamment l’emploi de larges touches rectangulaires se chevauchant en une forme puissante occupant très largement l’espace, mais dans une tension toute nouvelle, ayant formidablement gagné en dynamisme, en rythme, en présence.
Ainsi cette toile retravaille un thème pictural déjà exploré dans une peinture de même dimension acquise par l’Australian National Gallery de Camberra, Peinture 195x130 cm, 6 août 1956. Mais là où cette dernière frappait par une sorte de sévérité, de retenue, le fond gris en harmonie avec la forme sombre, la toile datée du 7 mars 1958 éclate au contraire de force, de violence même, de vie - on pourrait presque dire d’engagement. Soulages choisit d’y opposer un fond clair parcouru de transparences ocres par arrachages au couteau à une forme d’un noir incroyablement lumineux, un noir « couleur de lumière » comme disait Matisse. Et tout se passe alors comme si le peintre allait chercher le spectateur les yeux dans les yeux, l’empoignait pour le mettre face à la luminosité ensorcelante de la peinture pure dès lors qu’on y met en tension dynamique sombres et clairs, sans la moindre référence extérieure à elle-même. Ses amis Niomar et Paulo Bittencourt n’ont pas hésité à répondre à cette interpellation, achetant la toile dans l’atelier aussitôt qu’ils l’eurent vue.
Pierre Encrevé
Directeur d'études à l'Ecole des hautes études en sciences sociales, spécialiste de phonologie et de sociopragmatique, auteur du catalogue raisonné de Pierre Soulages
Catalogue note
Collection Niomar Moniz Sodré Bittencourt
Daughter of a journalist and politician known for his progressive point of view, and born in Salvador in North East Brazil when the First World War was at its height, Niomar Moniz Sodré Bittencourt (4.09.1916 – 31.10.2003) was certainly predestined to become one of the leading figures of the avant-garde movement of her time and the fight for the freedom of expression under the military dictatorship that struck Brazil between 1964 and 1985. A great collector of artwork, Niomar Sodré was also friends with the greatest artists of the post-war period, an unfailing support of contemporary creation and the co-founder of the Museum of Modern Art in Rio, one of the first in Latin America to promote modern European art and whose collection disappeared in a tragic fire in 1978.
Niomar Sodré began writing during her teenage years. Plays, poems, novels… Before embracing a career as a journalist and earning her stripes at the Correio da Manhã. Here she met the man who would change her life, Paulo Bittencourt, chief editor of this important democratic newspaper at the time. Both passionate about art and fervent defenders of the freedom of expression, Niomar Sodré and Paulo Bittencourt resemble each other. They got married a year after their encounter. Together, they fought so that Rio, like New York, would have its own museum of modern art. This indeed was done with the creation of the Rio Museum of Modern Art at the end of the 1940s. During the years that followed, under the direction and then the supervision of Niomar Sodré who was successively its director and then president, the MAM became a place of cultural gathering and asserted itself as a place of learning for young artists and of experimentation of new forms of visual expression. In parallel to her activity in Brazil, Niomar Sodré frequently went to Europe and the United States where she met Soulages, Arp, Giacometti, Morandi, Brancusi, Staël, Dubuffet, Vieira da Silva and Duchamp. She built an admirable collection for the museum, but also for herself and her husband. These collections had a tragic destiny, as almost all of the works were destroyed in the flames of the fire that occurred at the MAM in 1978 and then in Niomar Sodré’s apartment seven years later.
Today, while the MAM masterpieces including several Matisse, Magritte, Dali, Klee, Miro, Pollock or even Rivera have disappeared, like those in Niomar Moniz Sodré Bittencourt’s carioca apartment among which figured paintings of inestimable value signed by Picasso, Rothko or Mondrian, only a few works from the Sodré collection have reached us. Peinture 195 x 130cm, 7 mars 1958 is thus an historical work in more ways than one, as not only is it a prodigious painting by one of the greatest masters of art of the second half of the 20th century but also the record, almost the relic, of the great Niomar Moniz Sodré Bittencourt collection.
Peinture 195 x 130 cm, 7 mars 1958
This major painting from the last years of the 1950s is perfectly characteristic of Soulages’s work upon his return from his first “world trip”. The artist went to New York at the beginning of November 1957 for his fourth solo show at the Kootz Galley where, with his wife , he received a very warm welcome, with a reception, at the Moma and the Guggenheim and many private parties. Here they befriended many of the abstract expressionists of New York and left for Japan with their friend Zao Wou Ki where Soulages was to receive the Tokyo Biennale prize. They only came back to Paris on the 1st of March 1958 having travelled to Thailand, Cambodia, India, Pakistan, Lebanon, Turkey, Athens and Rome. In Paris, Soulages’s new studio awaited them, a vast space on the third floor of an old house, its large windows looking out onto Notre-Dame. Soulages immediately went back to painting and on March the 7th he painted this large canvas: an immediate masterpiece, as if he wished to inscribe at once all his energy from four months of travelling and all his impatience to begin painting again. Elements characteristic of his works from the previous year can be found, in particular the use of large rectangular brushstrokes, overlapping into a powerful form, occupying a large part of the space, but in an altogether new tension, having greatly gained in dynamism, rhythm and presence.
This canvas thus reworks the pictorial theme already explored in a painting of the same size purchased by the Australian National Gallery of Camberra, Peinture 195x130 cm, 6 août 1956. But where the latter is striking in its serenity, its reserve, the grey background in harmony with the sombre form, the canvas dated March 7th 1958 explodes on the contrary with the force, even the violence, of life – one could almost say conviction. Soulages chose to contrast a light background crossed with transparency, with an incredibly luminous black form, a black “the colour of light” as Matisse said, spread by a knife that seems to tear the surface. It is as if the painter sought out the spectator, looked at him full in the face, seized hold of him in order to confront him with the bewitching luminosity of pure painting, in a dynamic tension between dark and light, without the slightest reference to anything outside of itself.
Pierre Encrevé
Director of Research at the Ecole des hautes études en sciences sociales, phonology and psycholinguistic specialist, author of the Pierre Soulages catalogue raisonné