Lot 54
  • 54

Attribué à Jean-Siméon Chardin

Estimate
50,000 - 70,000 EUR
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Description

  • Jean-Siméon Chardin
  • Le singe peintre
  • Huile sur toile
  • 11 x 9 inches

Provenance

Dr. James Simon (1851 - 1932), Berlin;
Sa vente, Berlin, Rudolphe Lepke's Kunst-Auctions-Haus, 29 novembre 1932, lot 50;
Collection particulière jusqu'en 1983;
Acquis chez ce dernier par l'actuel propriétaire

Literature

P. Rosenberg, Chardin, 1699 - 1779, catalogue de l'exposition,1979, p. 223, sous le cat.no. 66 (p. 222 de l'ed. américaine);
P. Rosenberg, Tout l'oeuvre de Chardin, Paris 1983, p. 90, cité sous le cat. no. 93 B;
P. Rosenberg et R. Temperini, Chardin, suivi du catalogue des oeuvres, Paris 1999, p. 232, cité sous le cat. no. 94 C.

Condition

The painting is in a good state of preservation. It has been correctly relined, a long time ago. Under the UV light : green uniform varnish. We can notice painting retouchings along the right edge, and in the lower right corner. We can also see a restoration in the red clothe of the monkey.
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Catalogue Note

Le tableau que nous présentons n’était connu jusqu’alors que par sa mention, comme œuvre de Jean Baptiste Chardin, dans le catalogue de la vente de la collection James Simon en 1932.

Plusieurs versions de cette composition sont connues dans le corpus de l’artiste et l’on sait qu’il exposa au salon du Louvre en 1740, deux singeries. La critique considère désormais les deux œuvres du musée des Beaux-Arts de Chartres comme étant les deux seules versions certaines (de cette dimension 28.5 x 23 cm) et comme étant celles provenant de la collection du sculpteur Jean Baptiste Lemoyne (1704 – 1778).

Les gravures réalisées par Pierre Louis Surrugue fils d’après  les compositions le singe peintre et de son pendant  le singe antiquaire attestent de la grande popularité de cette iconographie, autorisant à supposer que Chardin ait réalisé plusieurs versions.
La gravure du Singe peintre souligne la dimension humoristique du tableau par un verset d’un ami proche de Chardin, ajouté sous l’image par Surugue. Les rimes embrassées du poète Charles-Etienne Pesselier fustige l’inspiration directe d’un peintre à partir de l’œuvre d’un autre, tandis que la noblesse créatrice puise ses sources dans l’imitation de la nature :

Le singe, Imitateur exact ou peu fidèle,
Est un animal fort commun
Et tel homme icy bas est le peintre de l’un
Qui sert à l’autre de modèle

La valeur satirique de l’œuvre, que notre tableau illustre à merveille, est indéniable. La mise en abîme du spectateur par le regard du primate, qui se rapproche intensément d’un regard humain, est subtilement renforcée par un jeu d’écho, en miroir. En effet, le singe mime l’homme de la même manière que l’homme devient primate lorsqu’il se fait imitateur de ses semblables, d’où l’importance capitale de la création d’après la nature dans la réalisation picturale.

Il existe une autre version du Singe peintre conservée au Louvre, cependant les dimensions sont plus importantes et la provenance est différente. Douze toiles sur le thème du singe peintre sont mentionnées dans les ouvrages sur Chardin, certaines signalées comme perdues. Le processus de gravure et ce nombre important de variantes suggèrent la popularité de ce thème. Chardin s’adonnait certainement à ce type de représentations dans une dynamique commerciale, ces dernières séduisant la clientèle éclairée du XVIIIe siècle. La demande des collectionneurs pour la représentation satyrique du singe était sans doute bien réelle.

La formulation du singe peintre a pour source l’expression de Filippo Villani, chroniqueur florentin du XIVème siècle « ars simia naturæ », désignant « ou la stupidité de l’imitation ou le mensonge sur lequel était fondée sa réussite ».
Le thème du singe s’est déjà immiscé par les illustrations parfois allégoriques des fables et par la mode des chinoiseries de la fin du XVIIe siècle. Le primate, personnage littéraire, objet de curiosité scientifique et animal de compagnie très prisé au milieu du XVIIIe siècle; connaît déjà un certain succès à travers les singeries flamandes retrouvées chez Teniers, très appréciées à Paris durant tout le XVIIIème siècle. L’influence de Watteau n’est pas non plus à négliger, le peintre du Roi avait produit un Peintre singe aux prémices de sa carrière, vers 1710, l’œuvre, considérée aujourd’hui comme perdue et connue par une gravure.
Le singe peut incarner une figure comique comme une allégorie réflexive de l’artiste. Son large panel symbolique et l’intérêt qu’il suscite s’expliquent aussi par les avancées scientifiques des naturalistes qui observent de plus en plus de points communs entre cet animal troublant et l’homme. Cela suscite des réflexions philosophiques au cours du siècle. Ainsi, Charles Le Brun, dans son Traité sur la physiognomonie de 1746 pousse la comparaison jusqu’au plan physique du singe intelligent et de l’homme.