PF1229

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Lot 9
  • 9

René Magritte

Estimate
1,000,000 - 1,500,000 EUR
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bidding is closed

Description

  • René Magritte
  • La Parure de l'orage
  • signé ; titré sur le châssis
  • huile sur toile
  • 81,1 x 115,8 cm
  • 31 7/8 x 45 1/2 in.

Provenance

Paul-Gustave Van Hecke, Bruxelles
E. L. T. Mesens, Bruxelles (acquis auprès du précédent en 1932)
Alex Salkin, Bruxelles
Hermann  Toussaint, Bruxelles
Baron J. B. Urvater (acquis auprès du précédent vers 1951-52)
Galleria Tornabuoni, Florence
Acquis auprès du précédent dans les années 1990

Exhibited

Bruxelles, Galerie L'Epoque, René Magritte, 1928, no. 21
Charleroi, Salle de la Bourse, XXXe salon du Cercle Royal Artistique et Littéraire de Charleroi, 'Rétrospective Magritte', 1956, no. 40
Otterlo, Museum Kröller-Müller, Les Grandes collections belges : Collection Urvater (exposition itinérante), 1957-59, no. 74 & no. 56
Londres, Tate Gallery, Magritte, 1969, no. 10
Bruxelles, Palais des Beaux-Arts, Rétrospective Magritte, 1978, no. 43
Londres, The Hayward Gallery ; New York, The Metropolitan Museum of Art ; Houston, The Menil Collection & Chicago, The Art Institute of Chicago, Magritte, 1992-93, no. 26
Rome, Complesso del Vittoriano, Magritte : La storia centrale, 2001, n.n.
Tokyo, The Bunkamura Museum of Art ; Nagoya, Nagoya City Art Museum & Hiroshima, Hiroshima Museum of Art, René Magritte, 2002, no. 13
Londres, Royal Academy of Arts & Bilbao, Museo Guggenheim, Paris : Capital of the Arts 1900-1968, 2002, no. 140
Paris, Galerie nationale du Jeu de Paume, Magritte, 2003, n.n.
Vienne, Kunstforum Wien & Bâle, Fondation Beyeler, René Magritte : The Key to Dreams, 2005, no. 19
Ostende, Provinciaal Museum voor Moderne Kunst, Ensor et les avant-gardes à la mer, 2006, n.n.
Milan, Palazzo Reale, Magritte. Il misterio della natura, 2008, n.n.
Vienne, Albertina, Magritte, A bis Z, 2011-12, n.n.

Literature

Louis Scutenaire, René Magritte, Bruxelles, 1947, reproduit n.p.
Patrick Waldberg, René Magritte, Bruxelles, 1965, reproduit p. 208
Abraham Marie Hammacher, René Magritte, Paris, 1974, pp. 92-93
Philippe Roberts-Jones, 'Magritte ou la leçon poétique' in La Revue générale, Bruxelles, juin-juillet 1980, pp. 17 & 19
Abraham Marie Hammacher, René Magritte, New York, 1986, pp. 70-71
Gaëtan Picon, Surrealists and Surrealism 1919-1939, Genève, 1977, reproduit p. 143
David Sylvester (ed.), René Magritte, catalogue raisonné, Anvers & Londres, 1992, vol. I : Oil Paintings 1916-1930, no. 170, reproduit p. 238

Condition

This work is in good condition. The canvas is not lined. A close inspection reveals evidence of old frame abrasion along the edges and two horizontal lines of shrinkage in the dark pigment of the sky to the right of the painting's centre and across the centre of the left-most white form. Examination under UV light reveals small spots of retouching along the edges, notably around the upper right corner, including a 1cm² spot to the upper left of the signature. There is a 1.5cm restoration towards the lower right corner which is visible from the verso. There are three small spots and four thin lines of retouching in the dark pigment of the upper left quadrant. There is a varnish which impedes further examination.
"In response to your inquiry, we are pleased to provide you with a general report of the condition of the property described above. Since we are not professional conservators or restorers, we urge you to consult with a restorer or conservator of your choice who will be better able to provide a detailed, professional report. Prospective buyers should inspect each lot to satisfy themselves as to condition and must understand that any statement made by Sotheby's is merely a subjective, qualified opinion. Prospective buyers should also refer to any Important Notices regarding this sale, which are printed in the Sale Catalogue.
NOTWITHSTANDING THIS REPORT OR ANY DISCUSSIONS CONCERNING A LOT, ALL LOTS ARE OFFERED AND SOLD AS IS" IN ACCORDANCE WITH THE CONDITIONS OF BUSINESS PRINTED IN THE SALE CATALOGUE."

Catalogue Note

signed ; titled on the stretcher ; oil on canvas. Painted in 1927.

Veuillez noter que cette œuvre a fait l'objet d'une demande de prêt pour l'exposition itinérante René Magritte : 1926-1938 qui aura lieu au Museum of Modern Art de New York, à la Menil Collection de Houston et à l'Art Institute de Chicago entre septembre 2013 et octobre 2014.


Découpage

"Il est question dans un texte de "papier masqué". C’est l’expression poétique, d’un de mes amis, pour désigner des figures en papier – trouées régulièrement par des formes géométriques diverses – qui figurent dans certains de mes tableaux."

René Magritte, Lettre à V. Kahmen, 8 juillet 1965

"Les six personnages bien que minces et transparents ont une ombre et leur découpe spectrale et caricaturale ressemble à l’écume des vagues inscrivant des formes étranges le long d’une plage. La Parure de l’orage marque l’apogée des paysages troublants de cette époque. Le choc qui se produit entre les divers éléments est couvert par les tons sombres d’une mélodie solennelle chantée par des voix de basse profonde."

A.M. Hammacher, René Magritte, New York, 1973, pp. 92-93 

René Magritte peint fort probablement La Parure de l’orage à l’automne 1927, peu après son arrivée à Paris. L’artiste qui, une année plus tôt, annonçait la constitution d’un groupe surréaliste belge (en compagnie de Mesens, Nougé, Goemans et du compositeur André Souris) vient de réaliser sa première exposition personnelle à la galerie du Centaure à Bruxelles, événement qui n’a pas rencontré le succès espéré. Rapidement, Magritte décide de rejoindre Camille Goemans qui vient d’ouvrir une galerie rue de Seine et entreprend de nouer des contacts avec le groupe parisien réuni autour d’André Breton. Il n’exclut pas, avec optimisme, de trouver en France la reconnaissance qui lui fait défaut dans son pays.

Exécutée en 1927, La Parure de l’orage est nourrie de ces nouvelles rencontres artistiques. Magritte y introduit des silhouettes dentelées ou figures inspirées de papiers découpés qui ne sont pas sans évoquer les découpages/collages de Max Ernst ou encore certains reliefs de Jean Arp que Magritte connaît bien. Une lettre de Paul Nougé à René Magritte atteste de ces "expériences" réalisées avec des « morceaux de papiers découpés » au cours des mois d’octobre et novembre 1927. Le poète y déclare : "ce qui me touche particulièrement, c’est la fonction que vous assignez à ces morceaux de papier découpé, objet inexplicable qui sert à cacher, en fait à suggérer plus fortement que par l’image tout ce qu’il dissimule, car l’on ne peut admettre qu’il ne dissimule rien" (Lettre de Paul Nougé à René Magritte, in. David Sylvester, René Magritte, Catalogue raisonné, vol. 1, op. cit., p. 237).

Ici et là, tirant parti de la déchirure, de la bigarrure, du puzzle mental, l’artiste se plaît à brouiller les pistes et alimenter le mystère. Peuplant l’espace scénique de formes plates alvéolées aux allures fantomatiques, Magritte révèle un espace sombre, inidentifiable dont le silence abyssal semble encore augmenté par la présence d’un arrière-plan déchainé. Si ces silhouettes fragiles, énigmatiques, aux contours quasi abstraits semblent se détacher de la comédie humaine, elles ne sont peut-être, comme pourrait le suggérer le titre du tableau, que de simples éléments de décor destinés à magnifier la tempête qui fait rage à l’arrière-plan.

En toile de fond, on découvre une mer déchainée sur laquelle vogue un bateau en perdition qui fait écho au naufrage de La Traversé difficile. La perspective est marquée, à l’instar d’une scène de théâtre. On y décèle l’influence de Giorgio de Chirico que Magritte a découvert, émerveillé, quelques années plus tôt. Cette rencontre a produit sur Magritte un effet révolutionnaire : "Mes yeux ont vu la pensée pour la première fois", écrira-t-il plus tard.  C’est "la rupture complète avec les habitudes mentales propres aux artistes prisonniers du talent, de la virtuosité et de toutes les petites spécialités esthétiques. Il s’agit d’une nouvelle vision où le spectateur retrouve son isolement et entend le silence du monde" (René Magritte, "La Ligne de vie" dans G. Ollinger-Zinque et F. Leen (sous la direction de), René Magritte, Catalogue du Centenaire, Bruxelles, Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique, 1988, p. 44). Dès lors, le peintre conçoit ses premières œuvres surréalistes selon un nouvel ordre nourri de la découverte de ce peintre : univers poétique, assemblages inattendus, jeux d’échelles et de perspectives …. , caractéristiques que l’on retrouve aisément dans La Parure de l’orage.

Exposée dès janvier 1928 à la Galerie l’Epoque (Bruxelles) dirigée par E. L. T. Mesens, La Parure de l’orage rencontre un immédiat succès. En témoignent les échanges de Camille Goemans et Pierre Janlet qui se désespèrent que la toile ait déjà trouvé preneur lors de l’exposition : "La grande toile, avec les personnages en papier découpé, et l’autre […] sont malheureusement vendues" (Lettre de Camille Goemans à Pierre Janlet, 13 janvier 1928). La toile est en effet acquise peu après son exécution par Paul-Gustave Van Hecke. Ce dernier, à la fois critique d’art, collectionneur, marchand, galeriste, directeur d'une maison de mode, poète, cinéaste, homme de théâtre et acteur politique est à la pointe de toutes les avant-gardes et défend avec ferveur le Surréalisme. Le tableau passe ensuite entre les mains d’artiste et de collectionneurs belges de renom, au premier rang desquels E.L.T. Mesens.

 

René Magritte probably painted La Parure de l’orage in autumn 1927, soon after his arrival in Paris. The artist who, the year before, had announced the creation of the Belgian Surrealist group (along with Mesens, Nougé, Goemans and the composer André Souris) had just held his first monographic exhibition at the Centaure Gallery in Brussels, though the event had not been as successful as he had hoped. Magritte decided to join Camille Goemans who had just opened a gallery on the Rue de Seine and tried to establish contacts with the Parisian group centred around André Breton. He optimistically thought that in France he might at last find the recognition that had so far eluded him in his own country.

Executed in 1927, La Parure de l’orage is the fruit of these new artistic encounters. Magritte introduces jagged silhouettes or figures inspired by paper cut-outs which recall Max Ernst’s decoupages and collages as well as the reliefs by Jean Arp that he knew well. A letter from Paul Nougé to René Magritte speaks of these “experiments” achieved with “pieces of cut-out paper” in the course of October and November 1927. The poet declares: “what particularly strikes me is the function that you assign to these cut-out pieces of paper, inexplicable objects that serve to hide, in fact to suggest more strongly than images all that they conceal, because we cannot admit that they conceal nothing” (Letter from Paul Nougé to René Magritte, in. David Sylvester, René Magritte, Catalogue raisonné, vol. 1, op. cit., p. 237).

Here and there, making the most of the tears, the juxtaposition, the mental puzzles, the artist playfully covers his tracks and enriches the mystery. Populating the scene with flat, honeycombed shapes with ghostlike qualities, Magritte reveals a sombre, unidentifiable space whose abyssal silence seems to be enhanced by the presence of a turbulent background. Though these fragile, enigmatic silhouettes with quasi-abstract contours seem to be detached from human experience, they are perhaps, as the title of the painting suggests, merely decorative elements designed to magnify the storm raging in the background.

At the rear of the canvas, we see a wild sea on which there sails a troubled boat that echoes the shipwreck in La Traversé difficile (fig. 1). The perspective is exaggerated, as in a scene from the theatre. We can discern the influence of Giorgio de Chirico whom Magritte had been amazed to discover a few years earlier. This encounter had a revolutionary effect on Magritte: “My eyes saw thought for the first time”, he later wrote. It was “a complete break from the mental processes of artists who are imprisoned by talent, by virtuosity and by all the aesthetic specialities. It was a new vision in which the viewer regains his isolation and hears the silence of the world” (René Magritte, "La Ligne de vie" in G. Ollinger-Zinque and F. Leen (editors), René Magritte, Catalogue du Centenaire, Brussels, Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique, 1988, p. 44). From then on, the painter conceived his first Surrealist works according to new order inspired by the discovery of De Chirico: a poetic universe, unexpected juxtapositions, playing with scale and perspective …. all characteristics that we easily identify in La Parure de l’orage.

Exhibited in January 1928 at the Galerie l’Epoque (Brussels) managed by E. L. T. Mesens, La Parure de l’orage was an immediate success. Exchanges between Camille Goemans and Pierre Janlet attest to this, as they express their devastation that the canvas had already found a buyer during the exhibition: “The large canvas, with the cut-out paper figures, and the other […] have unfortunately been sold” (Letter from Camille Goemans to Pierre Janlet, 13th January 1928). The work was in effect acquired soon after its completion by Paul-Gustave Van Hecke. Art critic, collector, dealer, gallery owner, couture house director, poet, film director, man of the theatre and political activist, Van Hecke was at the forefront of the avant-gardes and a fervent supporter of Surrealism. The painting later passed into the hands of renowned Belgian artists and collectors, chiefly E.L.T. Mesens.