PF1205

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Lot 7
  • 7

Nicolas de Staël

Estimate
350,000 - 500,000 EUR
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bidding is closed

Description

  • Nicolas de Staël
  • Gentilly
  • signé et daté; signé, titré, daté 1952 et dédicacé à Denys Sutton amicalement Nicolas au dos
  • huile sur carton
  • 38 x 55 cm; 15 x 21 5/8 in.

Provenance

Acquis auprès de l'artiste et transmis par descendance au propriétaire actuel

Condition

The overall tonality is lighter in the original and the image does not convey the texture of the work. The work is executed on cardboard, slighlty convex. Some minor paintlosses located along the four edges, some of them (the ones located along the right edge) carefully restored, are only visible under very close inspection. A careful retouching (approx. 1,5 cm) located 10 cm from the lower edge and 16 cm from tyhe left edge is only visible under UV light. This work is in very good condition.
"In response to your inquiry, we are pleased to provide you with a general report of the condition of the property described above. Since we are not professional conservators or restorers, we urge you to consult with a restorer or conservator of your choice who will be better able to provide a detailed, professional report. Prospective buyers should inspect each lot to satisfy themselves as to condition and must understand that any statement made by Sotheby's is merely a subjective, qualified opinion. Prospective buyers should also refer to any Important Notices regarding this sale, which are printed in the Sale Catalogue.
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Catalogue Note

Deux œuvres de Nicolas de Staël provenant de la Collection de Denys Sutton

Fin juillet 1950, Nicolas de Staël est à Londres. Il rend visite à Denys Sutton qui prépare une exposition de ses œuvres à la galerie Matthiesen, exposition qui n'adviendra qu'en 1952. Une amitié féconde se noue qui s'exprimera par de nombreux échanges épistolaires et par plusieurs achats de tableaux de la part du critique dont les deux œuvres présentées ici.

Denys Sutton (1917-1991) commence sa carrière durant la guerre aux Affaires Etrangères à Londres. En 1946 il est nommé secrétaire de la Commission Internationale pour la restitution des biens culturels, puis travaille à partir de 1948 pour l'Unesco comme spécialiste des Beaux-Arts. Critique d'art, il écrit pour  le magazine Horizons, puis le Daily Telegraph,  le Financial Times et Country Life. De 1962 à 1986, il dirige le magazine Apollo, tout en organisant en parallèle des expositions et en écrivant des biographies artistiques. Collectionneur touche à tout, son intérêt est stimulé tout autant par les antiquités égyptiennes que par la peinture contemporaine.

Lors de leur rencontre, Nicolas de Staël lui accorde d'emblée sa confiance et le laisse piloter le projet d'exposition chez Matthiesen.  Cette exposition est importante à plus d'un titre : première exposition à Londres, c'est une petite rétrospective de 26 œuvres, qui présente des œuvres de différentes périodes (dont Composition, 1947) et les premières natures mortes de 1952 dont plusieurs bouteilles. C'est toute la période de transition entre une peinture abstraite à une peinture où certains éléments de la réalité restent identifiables qui est rendue visible à travers cette exposition.

Composition de 1947 est à ce titre un parfait exemple de la phase peut être la plus abstraite de l'artiste.  La composition de l'œuvre s'organise autour de transparences et jeux de lumière qui séparent des masses sombres de formes fines et pointues enchevêtrées. Dès 1949 en effet, les touches se sont élargies jusqu'à s'organiser en formes géométriques et aplats de couleurs plus claires. De cette période date Composition, 1950, également présentée dans l'exposition de Londres et achetée par Sutton.

Sutton a foi dans les œuvres du peintre et son évolution artistique, comme Staël l'écrit à sa femme Françoise restée à Paris dans une lettre du 31 juillet 1950 : «C'est une grande histoire, t'as pas idée de ce qu'est Londres. Sutton veut que mon exposition succède au dessin du XVIIIe, c'est culotté mais il a l'air d'avoir pas peur et de croire en ce que je fais. (...)Je n'arrive pas à saisir l'intérêt de Sutton à s'occuper de tout cela mais il se peut que ce soit simplement par orgueil national pour créer un véritable mouvement(...)».

L'exposition prenant du retard, une correspondance s'installe entre les deux hommes. L'artiste lui fait part des changements qui s'opèrent dans son œuvre. En 1951, en effet, il produit moins, conscient d'être à un tournant. Il juxtapose, superpose parfois des couches de couleurs pures afin de casser l'effet de barres de ses précédentes compositions de 1950.  Il visite l'exposition des Fauves au Musée National d'Art Moderne, il étudie Van Goh. A Sutton mi-novembre 1951 il écrit : «Hess a dû vous dire que je pense pouvoir évoluer, Dieu sait comment, vers plus de clarté en peinture et que cela me met dans un état désagréable de trouble permanent.»

Le critique semble comprendre cette évolution et en tient compte dans la préface à l'exposition qui ouvre finalement le 21 février 1952 à la galerie Matthiesen : « Même si pour beaucoup de gens, la vie moderne a semblé se terminer dans la négation ou le décoratif facile, de Staël a établi dans ces œuvres sa foi dans une œuvre tangible, nourrie par la lumière. Il a créé des «vues» qui existent dans cette brume légère ou cette semi-obscurité qui apparaît quand se mêlent la réalité et le rêve, ou dans la paix mystérieuse mais en alerte d'un monde enneigé. Ce sont des peintures qui élèvent l'esprit à des sommets montagneux. »

Staël apprécie, qui lui répond fin février 1952 par cette lettre : « Cher Denys, Merci pour tout ce que vous faites pour mes divagations péremptoires. Merci pour votre texte. Merci pour vous ».

Par ce texte, le critique anticipe le développement de la peinture de Staël et notamment, dès avril 1952, la peinture sur le motif dont l'œuvre Gentilly est issue. Utilisant en effet des cartons de petits formats, il peint les paysages des alentours de Paris : Mantes, Chevreuse, Gentilly. Rapidement, un horizon bas est tracé, les variations du ciel sont enregistrées et la composition s'organise en bandes de couleurs, comme ici en dégradés de gris.

Staël se place ainsi dans la lignée des peintres de paysage atmosphériques. A Londres il a notamment étudié les peintres anglais  et les collections de peinture de la Tate Gallery et de l'Ashmolean Museum d'Oxford où il remarque notamment un tableau de Constable. C'est à Denys Sutton qu'il cite ses influences, dans une lettre du printemps 1952 pour un projet de texte pour la Revue Botteghe Oscure: «Vous écrivez autant que vous voudrez libre, vaste ciel, paysage-marine Bonnington, Corot, Lorrain... et moi». Par ces indications assez larges, Staël, qui peut être si pointilleux lorsqu'il s'agit de guider un critique, illustre la confiance qu'il témoigne à Sutton et à sa sûreté de jugement. Confiance qui se retrouve dans la dédicace amicale qu'il appose sur le dos du tableau de Gentilly. Jugement  illustré par les acquisitions fondamentales pour l'artiste d'œuvres si représentatives de ses différentes périodes et de son évolution.

 

 

Catalogue de l'exposition à la Galerie Matthiesen, Londres, 1952

Nicolas de Staël dans son atelier, au 7 rue Gauguet, automne 1951 ©Musée de la photographie, Charleroi/Serge Vandercam

Composition (composition grise), 1950, huile sur toile, 200 x 400 cm