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Rousseau, Henri dit le Douanier
Description
- Rousseau, Henri dit le Douanier
- Lettre autographe signée, à Joséphine Nourry, datée. Paris, le 21 juin 1899.
Catalogue Note
La lettre à la bien-aimée.
Longue et magnifique lettre autographe du Douanier Rousseau (1844-1910), ornée du dessin d'une petite fleur.
Veuf, il entretient depuis une décennie une liaison avec Joséphine. Sa maîtresse est enfin libre depuis la mort de son mari, cocher de fiacre. Si les interdits sont levés, une querelle subsiste. Sans doute franc-maçon, le Douanier renâcle à l'idée d'un mariage religieux.
«Il est 7 heures du matin, et, je fais ce que je voulais faire en rentrant hier au soir ; mais j'étais fatigué, je préférais quoique n'ayant nullement envie de dormir me coucher tout de même pour reposer le Corps et non l'Esprit. J'ai à peine dormi me réveillens en sursaut, en t'appelant te cherchant, je suis tout courbaturé et mon mal de tête depuis hier soir ne me quitte pas. Nous nous sommes faits bien du mal mutuellement, oui, certes et pourquoi, pour un motif futtil par le fait. Ah ! que cette question de conviction fait donc du mal, nous nous aimons tous les deux, certes, et nous nous faisons un mal énorme, nous empoisonnons notre existence, ces douces heures que nous passons dans une seule et même pensée d'affection le plus grand des biens.
Tu es charmante ma petite Joséphine, ma bien aimée, sur tous les points, tu es intelligente eh bien je voudrais te développer cette intelligence si utile chez la femme comme chez l'homme. D'un côté encore plus chez la femme puisqu'elle doit être sa compagne qui le charmera par sa grâce sa beauté sa science, et : qui, dans bien des occasions doit même l'aider. Dieu a donné à la femme comme à l'homme les mêmes dons, seulement sans qu'ils soient développés. Puisqu'il est partout, qu'il voit tout, il sait que nous nous aimons, que nous sommes unis par la même affection et que nous sommes sympathiques l'un à l'autre. Il n'a pas demandé que des hommes s'intitulent ses représentants sur la terre, puisqu'il voit tout, qu'il connaît jusque dans nos plus secrètes pensées, et que chez soi sans ostentation l'on peut s'élever vers lui se confesser même à lui à lui seul ! A ceux qui l'aiment il les empêchera de faire le mal, puisqu'ils le craindront, ainsi que tous les autres esprits qui sont autour de lui, qui est l'Esprit supérieur à tout, l'esprit par excellence. Il ne demande pas ce Dieu que l'on aille s'agenouiller devant un autre homme qui est la même chose que nous, mais qui n'aspire à aucune autre pensée que celle de tenir les esprits faibles et fanatiques sous un joug quelconque. (...)
Je t'aime, ma Joséphine, je t'aime ! Je t'embrasse des millions de fois, sur tes lèvres roses, que tout ton visage soit couvert en un mot de mes baisers brûlants, afin d'effacer les traces laissées par les pleurs que j'y ai fait malheureusement couler, et, dont je te prie de me pardonner ; ce que je pense tu feras au nom de l'amour et de l'affection que tu as pour moi.
Je t'embrasse encore bien des fois, et au plus tôt possible, en attendant Jeudi soir ; que je souffre, si rien ne me retenais, je m'ennirais te trouver.
Celui qui t'aime sincèrement ma petite Joséphine, ma bien aimée. H. Rousseau.»
Le mariage eut lieu trois mois plus tard à l'église Notre-Dame des Champs. Joséphine ouvrit une petite papeterie, où elle tentait de vendre les peintures du Douanier. Son portrait est au Musée Picasso.
En-tête, carte postale photographique représentant le Douanier dans son atelier, le violon à la main, enrichie d'un envoi autographe à sa fille :
Le peintre H. Rousseau
Dans son atelier
dédié à ma fille
Paris le 28 mai 1906.
Au verso, Madame Julia Rousseau. Angers.
Précieux ensemble de la collection Tristan Tzara (Cat. 1989, n° 362).