Lot 72
  • 72

Correspondance autographe avec son mécène Jacques André. A Paris et au Maroc, de 1924 à 1941.

Estimate
20,000 - 25,000 EUR
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Description

  • [André, Jacques]--Schmied, François-Louis
  • Correspondance autographe avec son mécène Jacques André.A Paris et au Maroc, de 1924 à 1941.
Ensemble de 188 documents, lettres autographes, photographies, dessins, gravures... dont :
- 140 lettres autographes signées de Schmied à Jacques André (98 au format in-4, 24 au format in-8 et 18 cartes postales).
- 21 photographies originales (dont 14 portraits de Schmied).
- 4 gouaches originales (une circulaire érotique, deux sur un même feuillet avec les instructions de Schmied "à effectuer en laque par Dunand" et une représentant une petite fontaine dans un parc).
- Une lithographie originale numérotée "10/12" et signée à la mine de plomb.
- 2 lettres autographes signées à Louis Barthou.
- Un dessin original et 5 lettres autographes signées de Théo Schmied (dont une avec un dessin original à la mine de plomb).
- Une lettre autographe signée de Jean Dunand.
- 2 lettres d'Alix Dunand (une dactylographiée annonçant la mort de Schmied et une autographe signée avec un petit dessin original).
Sont joints : 5 télégrammes, une invitation avec une lithographie de Schmied (en deux exemplaires).



reliure signée g. cretté succ. de marius michel (c. 1941). Maroquin bleu nuit, dos lisse, gardes de moire bleu, chemise un peu frottée et étui. Plats ornés de deux très belles laques polychromes signées de Jean Dunand sur plaque de cuivre : 
-  au premier plat, une laque (240 x 170 mm) représentant Schmied au Maroc, en habit traditionnel marocain dessinant devant une casbah;
- au second plat, une laque (170 x 100 mm) représentant le tombeau de Schmied au Maroc.

Catalogue Note

La correspondance de Schmied avec Jacques André permet d'approcher au plus près de l'intelligence de la création artistique ; sont exposés les rapports complexes entre le travail de l'artiste, la voix du peintre et les aspects concrets de son existence, pécuniaires notamment. Ainsi Schmied écrit à son mécène : « Je vous donnerai en échange [de 2000 francs] une figure que je viens de peindre. C'est un masque d'enfant et une main tenant un oiseau. C'est peut-être ma meilleure peinture. »

Cette correspondance est d'une importance cruciale pour une approche chronologique de l'œuvre de Schmied, qui livre jour après jour l'avancée de son travail – qu'il l'abatte « comme un bœuf » (le 3 janvier 1934) ou qu'il connaisse certains retards, notamment dans l'exécution des reliures. Il écrit par exemple le 18 novembre 1930 : « Mon Faust est en très bonne voie j'y travaille d'arrache-pied pour notre exposition qui s'ouvrira cette année le 10 Déc. ».

Il évoque les artistes avec lesquels il travaillait, au premier chef Dunand (dont il apprécie en ces termes le travail : « les deux merveilles que Dunand a faites sur les T. I et IV ». Cretté, le relieur, Miklos, dont il cite le Prométhée le 19 décembre 1934, ou Poncins (le 19 mars 1934 : « toute ligne tracée en direction du travail de Poncins signifie pour moi, immédiatement, une note à payer... ») ; il va jusqu'à écrire, le 9 septembre 1935, que s'il n'avait « le grand Miklos et ce vieux Dunand », son sort serait peu enviable. Cette amitié avec Miklos se ressent également dans les lettres du sculpteur à ce même mécène, présentées dans le lot suivant.

C'est à l'histoire d'une vie que l'on assiste dans ces lettres et, selon Schmied, « vivre pour des hommes comme nous c'est créer, c'est créer dans la beauté et c'est créer selon notre foi ».

Schmied confie à son mécène et ami ses tourments (« Misérable, oui, le destin d'un artiste ne serait être que cela » ou « le malheur s'est abattu sur ma maison ») et ses joies (sur une carte du 22 juillet 1928 : « En route, enfin, tout est oublié, mon cœur est gonflé de joie »), il répond à ses commandes d'œuvres d'art, lui emprunte de l'argent, « puisqu'il faut bien en arriver à parler de cette question originale et rare : l'ARGENT » (le 3 août 1938), lui demande de lui rendre des services pratiques – ainsi, le 16 septembre 1940, il le prie de lui acheter « un assortiment de couleurs en détrempe Plaka », chez « Sennelier Quai Voltaire » – ou encore, dans les dernières années, lui décrit sa vie au Maroc, lui dépeignant les «tourbillons de sable rouge et de vapeurs (qui) s'élèvent plus haut que les montagnes» ou les structures politiques marocaines : « notre politique actuelle au Maroc » lui semble propre à « offenser le plus possible l'élite de la population indigène » (le 1er octobre 1938).

Toute la dernière partie, sur sa vie au Maroc, est bouleversante. La correspondance est alors ponctuée de lettres et dessins de Théo, son fils, de Jean Dunand, de la fille de Jean Dunand, Alix, filleule de Schmied, qui le nomme affectueusement "Parrain Schmied " et qui envoie à l'ami plus qu'au mécène des petits croquis puis des photographies du tombeau où Schmied a voulu reposer. Terriblement émouvante également, la photographie de Jean-Louis Dunand, le fils du grand laqueur, en uniforme, placée au dessus de la photographie de sa tombe dans le cimetière où il fut enterré et la lettre de Schmied pleurant la douleur de son vieil ami : le 14 septembre 1940  « Pauvre Dunand ! Jamais l'éloignement ne m'a paru si lourd sur le cœur. »