Livres et Manuscrits
Livres et Manuscrits
Lot Closed
June 30, 12:33 PM GMT
Estimate
10,000 - 15,000 EUR
Lot Details
Description
COCTEAU, JEAN
ASTROLOGUE II.
1954.
Technique mixte (pastel, gouache et crayon) sur carton.
Signé "Jean Cocteau", daté 1954 en bas à droite.
120 x 77 cm.
Le 29 octobre 1954, Jean Cocteau écrit : "Mes figures au pastel naissent comme elles veulent. J’ai beau les effacer, les gratter, les recommencer, elles réapparaissent et me regardent avec des yeux moqueurs. Depuis trois jours la figure du troisième panneau refuse d’être de profil. Sa main gauche devient une main droite et vice versa. Je l’oblige à tourner le dos. Après une nuit de lutte, elle se remet de face. Sa main droite qui dénonce sa position véritable se couvre de lèpres. Je n’ose toucher au visage, car près de l’ombre que j’ai mise et qui la situe, elle m’opposera les mêmes lèpres que la main. Dès que la vie qu’on communique à des têtes nous quitte, que ces têtes "n’en font qu’à leur tête", une mystérieuse désobéissance, un acharnement d’une malice méchante se déchaînent contre nous, contre le père et la mère en une seule personne. La minute où nous ne pouvons plus rien, où le cordon ombilical est arraché, où la figure nous quitte, prend le large. Sic vos non vobis." (Le Passé défini, III).
Expositions :
- Jean Cocteau et la Méditerranée. Fondation Regards de Provence, Marseille, 2009, p. 84.
- Jean Cocteau, sur les pas d'un magicien. Evian, Palais Lumière, du 20 février au 23 mai 2010, p. 77.
- Plusieurs étiquettes d'expositions figurent aussi sur le châssis dont : Tokyo (n° 148) ; Kunsthalle Baden-Baden (n° 290) ; Jean Cocteau et la Grèce ; Cocteau 1954 (Association des Amis de Jean Cocteau), Vascoeuil (n ° 87) ; Jean Cocteau à New York (n° 153) ; Musée Jacquemart André.
Provenance : Succession Stéphane Dermit.
Un certificat du Comité Jean Cocteau sera remis à l’acquéreur.
"Je me suis mis à peindre par fatigue de l’encre et par un besoin de changer de véhicule, d’expulser ce qui m’encombre par d’autres portes. Je me suis mis à peindre parce que j’avais découvert que l’acte de peindre nous sort de nous-mêmes au point de nous anesthésier, de nous rendre insensibles à ce qui n’est pas le tableau." (Jean Cocteau, Démarche d’un poète, 1953.)
C’est un événement important pour les collectionneurs de Jean Cocteau, qu’ils soient bibliophiles ou amateurs de dessins et peintures de l’artiste, que la dispersion de neuf œuvres de l’artiste, quatre huiles sur toile et cinq techniques mixtes sur carton.
Ses premières huiles ont pour thème des sujets empruntés à la Bible ou à la mythologie comme le montrent les quatre huiles présentées ici.
Elles sont exceptionnelles tant par leur provenance que par leur rareté et leurs tailles.
Leur provenance, d’abord, est importante, car elles sont restées dans la "famille" depuis leur création, famille à la manière de Cocteau, famille "de cœur" comme le dit joliment Carole Weisweiller, la fille de Francine, grande amie de Cocteau. L’écrivain avait adopté Edouard Dermit à la fin des années 50 et en avait fait son légataire universel. Au décès de Cocteau, sans qu’il y ait une vente de succession, tout ce que l’artiste possédait est revenu à Dermit puis à ses deux enfants Stéphane et Jean. Et ce sont maintenant les deux enfants de Stéphane qui proposent ces neuf œuvres aux enchères.
La rareté de ces œuvres est également à souligner. Il est difficile d’évaluer le nombre d’huiles sur toile peintes par Cocteau, mais il semble juste de dire quelques dizaines. Carole Weisweiller nous dit que Cocteau a commencé à peindre à l’huile en 1951 quand Francine Weisweiller, sa mère, a décidé de transformer la serre de sa maison Santo Sospir de Saint Jean Cap Ferrat en un atelier pour l’artiste. À ce moment Weisweiller, Dermit et Cocteau se sont mis à peindre, souvent ensemble. Cocteau a continué de façon intermittente jusqu’à sa mort en 1963. Nous avons vu quelques toiles dans la vente de la succession Jean Marais, il y en a au musée Cocteau de Menton et il en reste quelques-unes chez quelques collectionneurs que l’on compte sur les doigts des deux mains. Le centre Pompidou possède une huile sur carton "Sommeil hollywoodien", 1953.
Enfin, la taille des œuvres est exceptionnelle, particulièrement celle des quatre huiles sur toile. Cocteau avait toujours besoin de dessiner, il dessinait comme il respirait, sur tout ce qu’il avait sous la main. Et il y a des centaines de dessins. Mais pour peindre sur toile, et en grand format, il fallait un atelier, des supports, des tubes de peintures, des outils... toutes choses qu’il n’avait pas dans le minuscule appartement de la rue Montpensier à Paris, ni même dans la petite maison de Milly-la-Forêt. On peut certainement dire que Cocteau aimait ces neuf œuvres, il les a gardées à Milly, rarement montrées. Quant à Edouard Dermit il les a très peu prêtées, seulement à quelques musées choisis, jamais vendues.
Je pense sincèrement que nous avons, avec cette vente chez Sotheby’s, une opportunité qui ne se reproduira sans doute pas, de pouvoir choisir entre neuf œuvres significatives du talent de Jean Cocteau.
Patrick Martin
Expert de l’œuvre graphique de Jean Cocteau Comité Cocteau. Paris.